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# Sur la poésie contemporaine chez les Arabes (nomades) et les
habitants des villes.
Les
Perses et les Grecs eurent des poètes. — Aristote a fait l’éloge du poète grec Omîros
(Homère). — Les Himyarites eurent aussi de grands poètes. — Le dialecte arabe
de l’Orient diffère de celui de l’Occident, et surtout du dialecte parlé en
Espagne. — La poésie existe chez tous les peuples. — Caractères de la poésie
chez les Arabes modernes. — Les savants ont tort de dédaigner les poèmes en
arabe vulgaire. — Nombreux échantillons de la poésie en style vulgaire,
surtout celle des Arabes Maghrébins.
# Sur les odes (mowascheha) et les chansons (ou
ballades, zedjel), poèmes propres à l’Espagne.
Origine
des mowascheha. — Poètes qui se sont distingués dans ce genre de composition.
— Échantillons avec la transcription en caractères romains. — Ode composée en
langue vulgaire par le vizir Ibn el‑Khatîb. — Mowaschehas composées par
des poètes de l’Orient. — Origine et histoire du genre de poésie appelé zedjel.
— Un long poème de ce genre. — Ce qu’on appelle dans le Maghreb Oroud el‑beled.
— Pièce de vers dont les idées sont évidemment empruntées à la poésie persane.
— Suite des mowaschehas. — Les mewalia. — Les Kan wa kan.
— Les Haufi. — Les dou‑beïtein. — Exemples de la mewalia.
— Pour bien apprécier ces poèmes, il faut comprendre les dialectes dans
lesquels ils sont composés. — Observations de l’auteur et fin de l’ouvrage.
Sur la poésie contemporaine chez les Arabes (nomades)
et les habitants des villes.
La poésie n’est pas un attribut spécial de la langue arabe : elle
existe dans tous les idiomes, tant arabes qu’étrangers. Les Perses eurent des
poètes et les Grecs aussi. Aristote, dans son ouvrage sur la logique, a fait
mention du poète Omîros (Homère) [1]
et en a parlé p.403 avec éloge. Les
Himyarites eurent aussi des poètes de premier ordre [2].
Lorsque la langue du peuple modérite se fut corrompue, et que leur idiome, dont
les règles philologiques et grammaticales ont été consignées dans des
recueils, se fut altéré, les Arabes qui vinrent ensuite se servirent de
dialectes qui différaient les uns des autres, selon
*360 le mélange plus ou moins fort d’éléments étrangers qui s’y étaient
introduits. Ces Arabes employèrent alors une langue qui différait de celle de
leurs prédécesseurs, les Modérites, et qui s’en distinguait par les désinences
grammaticales, par les significations assignées à un grand nombre de termes et
par les formes des mots. Il en fut de même des Arabes qui adoptèrent la vie
sédentaire et qui se fixèrent dans les villes ; il se forma chez eux un
autre dialecte qui différait de la langue de Moder par la syntaxe des
désinences, par les significations de beaucoup de mots et par les inflexions
grammaticales. Il différait aussi de la langue usitée chez la race arabe
(nomade), celle qui existe encore de nos jours. Chacun de ces idiomes offrait
encore des différences qui provenaient des usages conventionnels de chaque
localité. Le dialecte employé en Orient par les habitants (de la campagne) et
par ceux des villes n’est pas le même que celui dont on se sert dans les
contrées et dans les villes de l’Occident ; il diffère aussi de celui qui
se parle chez les habitants de l’Espagne.
Mais la poésie existe, par la nature même des choses, chez les peuples
de toute langue, car l’usage de couper les phrases d’après le nombre de lettres
mues et quiescentes [3],
et d’après la correspondance (mutuelle des pieds dans les vers), estimé chez
tous les peuples. Il ne faut pas croire que l’art poétique n’a pu exister que
dans une seule langue, je veux dire dans celle des Modérites, peuple qui,
comme chacun le sait, avait produit les cavaliers les plus distingués et les
plus brillants p.404 dans la
carrière de la poésie. Bien au contraire, les peuples qui ont un idiome
particulier, les Arabes barbarisants [4], par exemple, et les habitants des
villes, composent encore des vers, en y faisant de leur mieux, et construisent
l’édifice de leurs poèmes conformément au génie du dialecte dont ils se
servent. La race arabe qui nous est contemporaine, et dont le langage s’est
beaucoup écarté de celui des Modérites, leurs prédécesseurs, par suite de son
mélange avec des éléments étrangers, ces Arabes composent encore aujourd’hui
des vers sur tous les sujets que leurs prédécesseurs, les Arabes arabisés, avaient traités. Ils produisent des morceaux très
étendus, dans lesquels on reconnaît la marche et les pensées de l’ancienne
poésie : on y retrouve la mention *361 de la
bien‑aimée, l’éloge, l’élégie et la satire. On y voit aussi qu’ils savent
ménager les transitions afin de passer d’un sujet à un autre, et qu’il leur
arrive quelquefois d’entrer tout d’abord dans la matière dont ils veulent
parler. Chacun de ces poèmes commence ordinairement par indiquer le nom de
celui qui l’avait composé ; l’auteur passe ensuite à l’éloge de sa
maîtresse. Les Arabes du Maghreb donnent aux cacîdas (ou poèmes) de ce
genre le nom d’asmaïennes, en souvenir d’El‑Asmaï, le grand rapporteur des anciennes
poésies arabes. Les Arabes de l’Orient les désignent par le terme bédawiya (bédouins), [ou
hauraniya ou caïsiya] [5]. On les chante quelquefois, après y
avoir adapté des airs très simples, mais nullement conformes à la p.405 théorie de l’art musical. Ils désignent les
poèmes qui se chantent par le terme hauraniens,
mot dérivé de Hauran, qui est le
nom d’une province située sur les frontières de l’Irac et de la Syrie, et dans
laquelle les Arabes nomades ont continué à camper et à stationner jusqu’à ce
jour. Il y a encore chez ces Arabes un genre de poème qui est très usité et
qui se compose de stances renfermant chacune quatre vers [6],
dont le dernier diffère par la rime [7]
des trois autres. La même rime se reproduit à la fin de chaque quatrième vers
de la cacîda (poème). Ce genre de
poème ressemble aux morabbâ et aux mokhammés [8]
dont on doit l’invention à des poètes musulmans qui vécurent à une époque assez
moderne. Dans les pièces dont nous parlons, les Arabes exprimaient leurs idées
avec une netteté parfaite, et ont possédé depuis [9]
des (poètes) d’un grand talent.
Les savants des derniers siècles et la plupart de ceux qui, de nos
jours, cultivent les sciences, et surtout celles qui se rattachent à la langue,
méprisent le genre de poésie que ces Arabes ont adopté, et, quand on leur
récite de ces pièces, ils les écoutent avec un dédain *362 profond [10].
Ils s’imaginent qu’elles offensent le bon goût, parce qu’elles p.406 sont dans une langue abâtardie et que les
désinences grammaticales ne s’y emploient pas. Mais ce sentiment n’est provenu
chez eux que de l’impuissance où ils se trouvaient d’apprécier le mérite de
cette langue ; s’ils avaient possédé la même faculté de la comprendre qui
existe chez les (Arabes bédouins), ils auraient trouvé dans leur propre goût et
dans la disposition naturelle de leur esprit, — si toutefois ils avaient eu le goût
sain et le jugement droit, — ils y auraient trouvé un fort témoignage en faveur
de la capacité que cette langue possède pour exprimer des idées. Quant aux
inflexions désinentielles, elles n’ont rien à faire avec l’expression exacte
des idées, avec cet art de réalisation qui [11]
consiste dans la correspondance de la parole avec la pensée [12]
et avec les nuances qu’il faut exprimer [13].
Peu importe que le refâ [14]
indique l’agent (ou le sujet) et que le nasb [15]
désigne le patient (ou l’objet), ou vice versa ; les circonstances
accessoires offertes par le discours suffisent pour lever toute incertitude à cet
égard ; le langage parlé maintenant nous en offre la preuve. D’ailleurs,
les indications de ce genre sont purement conventionnelles et dépendent des
usages adoptés par chaque peuple dans l’emploi de sa langue. Or, lorsqu’on a pu
distinguer ce qui est de convention dans l’exercice d’une faculté, qu’on a vu
clairement que les indications (offertes par cette faculté) sont exactes, et
qu’on a reconnu que ces indications répondent aux intentions de celui qui parle
et aux exigences du cas, alors (on peut le dire) la réalisation (de
l’idée par la parole) s’est effectuée bien que les règles établies par les
grammairiens ne soient pas observées. Quant p.407
aux tournures reçues dans la poésie et aux divers genres de poèmes, tout
cela se retrouve dans les productions de ces Arabes : rien n’y manque,
excepté les voyelles qui marquent les cas et qui devraient se trouver à la fin
des mots. En effet, la plupart des mots se terminent par une pause [16] ;
mais les indications fournies par les accessoires de la phrase suffisent, chez
ces Arabes, pour faire distinguer l’agent du patient et le sujet de l’attribut,
sans qu’on ait besoin de recourir à l’emploi de voyelles désinentielles.
Voici un de leurs poèmes : il est censé avoir été prononcé par le
chérif Ibn Hachem, et exprime la douleur que le cherîf éprouve en se voyant
séparé d’El‑Djazia, fille de Serhan [17].
p.408 Le poète y parle du départ de
cette femme pour le Maghreb avec sa famille :
Le chérif Bou ’l-Hîdja Ben
Hachem [18] a dit au sujet de son cœur qui, envahi *363 (par la douleur), se plaignait de son infortune ; il
s’empresse de faire savoir par où son esprit est passé en poursuivant un jeune
Bédouin qui a tourmenté p.409 (son cœur) déjà trop affligé [19]. (Il annonce) combien son âme s’est
plainte (du malheur) qui la frappa dans la matinée des adieux ; puisse
Dieu faire périr celui qui en connaissait le secret ! Elle sent comme si
un bourreau la blessait jusque dans l’intérieur, avec un couteau [20] indien, fait d’acier pur. Elle est devenue
comme une brebis entre les mains d’un laveur dont la violence, pendant qu’il
serre les lanières qui l’attachent, cause (des douleurs) semblables à celles
que font les épines de l’acacia ; des entraves doubles lui serrent les
jambes ainsi que la tête, placée entre elles, et, pendant qu’il la frotte, il
la retient par le bout du licou [21]. Mes larmes se mirent à couler en
abondance comme si un (homme) p.410 les faisait monter en tournant de ses mains
une roue hydraulique. Le répit donné (à mes yeux) répare promptement leur
épuisement, et l’humidité qui s’y amasse *364 forme des nuages
épais qui augmentent (le torrent de larmes). (D’autres torrents) descendent,
en coulant de source, à travers la plaine qui touche au flanc d’Es‑Sefa [22], et, au milieu de cette abondance d’eau,
(se voit) la lueur des éclairs. Ce chant sera (pour toi) une consolation, quand
tu seras épris d’amour. Baghdad [23], jusqu’aux pauvres, gémit sur mon sort. Le
crieur annonça le départ, on lia (les bagages), et le (chameau) disponible se
tenait auprès de celui qui l’avait emprunté [24]. Empêche‑les de partir maintenant, ô Dîab
Ibn Ghanem ! c’est entre les mains du Madi Ibn Mocreb (qu’on a remis la
direction de) la marche. Hacen Ibn Serhan leur dit : Allez vers le
couchant, poussez devant vous les troupeaux ; c’est moi qui les protège.
Et il piqua en avant, parmi les (animaux), criant aux moutons et aux taureaux,
(mais) sans les écarter des champs verdoyants [25]. Zian le généreux, fils d’Abès [26], m’a laissé ; l’éclat et les riches approvisionnements *365 de Himyer [27] ne lui suffisaient pas. Il m’a laissé, lui
qui se disait mon ami et mon compagnon ; et je n’ai plus maintenant de
bouclier que je puisse opposer (à mes ennemis). Belal Ibn Hachem revint en leur
disant : Nous pouvons vivre dans le voisinage de la misère ; mais,
dans un pays de soif, nous ne le pouvons pas ; la porte de Baghdad et son
territoire nous sont défendus ; je n’y entrerai pas, je n’y retournerai
pas, et ma monture s’en éloignera. Mon âme renonce au pays d’Ibn Hachem, à
cause (de l’ardeur) du soleil ; (si j’y restais) la chaleur du midi ferait
descendre (sur moi) la mort. Pendant la nuit, les feux allumés par les jeunes
filles (de la tribu) jetaient des étincelles, et celui qui était le captif de
leurs (charmes) excitait son chameau sur la route de Loud à Khordjan [28].
Le poème qui suit fut composé par (un autre
de) ces Arabes sur p.411 la mort d’Abou
Soda el‑Ifreni, émir zenatien [29],
qui leur avait opposé une vive résistance [30]
en Ifrîkiya et dans le Zab [31].
Cette pièce élégiaque est conçue dans un ton purement ironique [32] :
Soda au beau visage [33] partira le matin avec la caravane en se
lamentant et dira : *366 O toi qui demandes où est le tombeau de Khalîfa le
Zenatien [34], en voici l’indication ; ne sois pas
lent à la saisir [35]. Je le vois en amont de la rivière
Zan [36], et au‑dessus de lui s’élève un couvent
eïçaouien [37] d’une construction élevée. Je le vois là
où le bas‑fonds s’éloigne [38] de la route qui conduit aux collines de
sable ; la rivière est à sa droite et le bois de roseaux en indique
(l’emplacement). Oh ! que mon cœur souffre à cause de Khalîfa le
Zenatien [39], rejeton de la postérité des hommes
généreux ! Il est mort sous les coups du héros des batailles, Dîab Ibn
Ghanem, et de ses blessures coule le sang ainsi que l’(eau) sort de la bouche
d’une outre. O toi (qui es devenue) notre voisine, sache que Khalîfa le
Zenatien p.412 est mort. Ne pars pas à moins que tu ne
veuilles partir ; hier, nous vous avons embrassée [40] trente fois ; seize fois par jour est
bien peu.
Voici une des pièces dans lesquelles ils racontent comment ils
partirent pour le Maghreb et enlevèrent ce pays aux Zenata [41] :
*367
Quel excellent ami j’ai perdu en Ibn Hachem !
Mais combien d’hommes avant moi ont perdu leurs meilleurs amis ! Entre lui
et moi la fierté (fit naître une discussion), et il me confondit par des
raisonnements dont la justesse ne m’échappa pas. Je demeurai (interdit) comme
si j’avais bu d’un vin pur et généreux, vin qui laisse sans force celui qu’il
a renversé [42]. (J’étais) comme une femme à cheveux gris
qui, le cœur paralysé [43], se meurt dans un pays étranger, repoussée
de sa tribu [44] ; réduite à la misère [45] par un temps de malheur, elle se trouve au
milieu d’Arabes grossiers qui ne font aucune attention à leur hôte. Voilà [46] comment j’étais par suite de mon
déshonneur [47] ; je me plaignais de (la douleur
qu’éprouvait) mon cœur, et je disais hautement ce qui l’avait rendu malade [48]. Alors je donnai à mes gens l’ordre du
départ, et ceux qui avaient chargé les chameaux renforcèrent les liens de nos
bagages [49]. Pendant sept jours nos troupeaux
restèrent privés (d’eau), et (nos) Bédouins ne dressèrent pas leurs tentes p.413 *361 pour s’y reposer [50]. On passa le jour sur les cimes de
collines dont les unes étaient en face des autres [51].
Voici un morceau dans lequel on fait parler le cherîf pour raconter la
dispute qui eut lieu entre lui et Madi Ibn Mocreb :
Madi le despote commença en me
disant : Chokr [52] ! nous ne sommes pas contents de
toi [53]. Allons, Chokr ! cesse tes reproches
et retourne dans le Nedjd [54] : celui-là seul a vécu qui est
demeuré dans son propre pays. Tu t’es éloigné de nous, ô Chokr ! pour te rapprocher
d’étrangers, et tu es devenu l’ami de ces Arabes qui s’habillent de (belles) étoffes. (Quant à nous) nous subissons ce que la providence nous a
destiné, de même que l’amorce du briquet subit (l’influence de) la rosée [55]. Bien que les plantes épineuses prospèrent
dans votre pays, (nous avons) ici des femmes arabes dont nous n’avons pas
augmenté le nombre des enfants [56].
Le poème qui suit fut composé par Soltan Ibn Modaffer Ibn Yahya [57],
membre de la tribu des Douaouida [58], branche de la tribu (arabe) des Rîah.
Ce chef le prononça [59]
pendant qu’il était retenu dans la prison p.414
*369 d’El‑Mehdiya, où le prince almohade, Abou
Zekeriya Ibn Abi Hafs, souverain de l’Ifrîkyia, l’avait fait enfermer [60] :
(Le poète) dit, quand l’apparition des
ténèbres vient le soulager [61] : Que le sommeil soit défendu [62] aux paupières de mes yeux ! Qui
viendra au secours d’un cœur qui est devenu le compagnon inséparable de la
douleur et du chagrin ? Qui soulagera une âme qui est folle d’amour et
dont la maladie me tourmente depuis longtemps. (Je suis épris) d’une femme du
Hidjaz, d’une Bédouine, d’une Arabe, qui montre de l’inimitié [63] pour un amant passionné [64], et qu’il ne peut espérer de rencontrer.
Elle aime avec passion la vie du désert et ne peut s’habituer aux villes ;
(aucun lieu ne lui plaît), excepté le pays des sables que l’on traverse si
difficilement, et où les tentes reçoivent des pluies dont les averses continuent
tout l’hiver. Voilà ce qui l’a séduite [65] ; voilà ce qu’elle désire (revoir).
Là, les terres humectées par la pluie fournissent aux puissantes chamelles qui
s’y promènent librement un herbage convenable. (Ces prairies) charment les
yeux [66] quand elles ont reçu une suite d’averses
provenant des nuages qui passent pendant *370 la nuit.
Pourquoi ces nuages répandent‑ils des larmes d’eau ? Pourquoi ces sources
abondantes où s’amasse [67] une eau toujours douce lancent‑elles des
éclairs [68] ? (La campagne) est comme une fiancée
habillée de vêtements éclatants, et les fleurs de la camomille [69] lui servent de ceinture [70]. (C’est) un désert, une plaine, un vaste
espace, un lieu d’égarement, un pays où les autruches courent au milieu des
troupeaux qu’on y fait paître. (Les femmes de la tribu) ont p.415 pour boisson le lait pur des chamelles enlevées à l’ennemi, et pour
nourriture la chair des daims. Pour les protéger, elles n’ont pas besoin de
portes ni de combats dont la mêlée fait blanchir d’effroi les cheveux des
guerriers. Que Dieu arrose de ses pluies ce vallon si bien boisé [71] qu’il y fasse tomber averse sur averse, et
qu’il rende la vie aux ossements [72] décharnés que ce sol (recouvre) !
Pour récompenser ces lieux (du bonheur qu’ils m’ont procuré), je leur offre mon
amour. Oh ! que je voudrais retrouver les jours que j’ai passés entre ces
collines de sable, ainsi que les nuits où je portais sur les bras l’arc de la
jeunesse et où aucune flèche ne manquait le but quand je me tenais debout (pour
la lancer). Dans le temps de ma jeunesse, mon cheval était toujours prêt, la
selle sur le dos ; il s’élançait vivement en avant [73] pendant que sa bride était dans ma
main [74]. Combien de *371 belles
dont les charmes m’ont empêché de dormir, et qui, en souriant, montraient des
dents bien rangées et d’un éclat dont je n’ai pas vu le pareil dans le monde.
Combien de filles aux seins arrondis, à la taille flexible [75], aux paupières bordées de noir, aux bras
ornés de tatouages ! Dans ma passion pour elles, je frappai de ma
main [76] sur (mon cœur) abattu, et leurs champs
humides n’ont pas oublié les pluies (de larmes) dont je les arrosai [77]. (Ils n’ont pas oublié) le feu ardent que
le bois de l’amour entretenait dans mon sein, et dont l’eau (de mes larmes) ne
pouvait éteindre la flamme. O toi qui m’as fait la promesse (d’accueillir mon
amour), jusqu’à quand [78] ma vie doit‑elle se passer dans une demeure
(la prison) où l’obscurité fait de moi un aveugle ? Cependant j’ai vu le
soleil s’éclipser pour une courte période et tomber en défaillance ; mais
ensuite les nuages qui le couvraient se dissipaient [79]. Puisse le bonheur approcher de nous,
pennons et bannières déployés ! puissent les drapeaux avancer en flottant
au gré du vent, et soutenus par l’aide de Dieu ! Ne vois‑je pas s’élever
devant mes yeux l’aspect de mes guerriers qui vont se mettre en route ?
(Je me vois avec eux) la lance sur l’épaule, et je marche à la tête de la
colonne ! (Ils sont là) dans la plaine [80] de Ghîath el‑Ferc, au‑dessus de Chames,
pays qui, de *372 toutes les contrées que Dieu a créées,
renferme les collines que j’aime le plus. (Ils se dirigent) vers le lieu de
halte, à E1‑Djâferiya, près du bord de la région p.416 sablonneuse ;
(ils vont) stationner dans ce lieu qui avait pour moi tant de charmes. Nous y
trouverons les nobles chefs de Hilal Ibn Amer, et la salutation que m’offrira
cette tribu éloignera [81] de moi le chagrin et la soif qui m’altère.
Voilà que ces chefs dont la bravoure est devenue proverbiale, tant en Occident
qu’en Orient, attaquent l’ennemi et le mettent promptement en déroute. Salut à
eux et à toutes les personnes qu’ils abritent sous leurs tentes [82] ! Que ce salut dure tant que les
colombes roucouleront dans (le bois de) Fîna [83] ! Mais laissons cela ! ne
regrettons plus le passé ; dans ce monde, rien ne dure pour personne [84].
Voici maintenant un poème composé par un autre de ces Arabes. Il vivait
dans ces derniers temps et se nommait Khaled Ibn Hamza Ibn Omar [85].
Dans cette pièce, il adressait des reproches aux Oulad [86]
Mohelhel, famille rivale de celle dont il était le chef, et qui formait, sous
le nom des Oulad Abi ’l-Leïl, une des branches de la grande tribu des
Kaoub. Il y répondait en même temps à une pièce de vers dans laquelle Chibl Ibn
Meskîana Ibn Mohelhel [87],
le poète des Oulad Mohelhel, exaltait la gloire de sa famille et dépréciait
celle des Oulad Abi ’l-Leïl [88].
*376
Une de leurs maximes proverbiales est conçue en ces termes :
Rechercher ce qu’on ne t’accordera pas est
un acte de folie ; tourne le dos à celui qui se détourne de toi, et tu
feras bien. Si les hommes te ferment leurs portes, (monte) à dos de chameau et
Dieu t’en ouvrira une.
Les vieillards et les jeunes gens de la
famille de Terdjem excitent, par leur violence, les plaintes de tous les
hommes.
Dans la pièce suivante, Khaled (Ibn Hamza) blâme ses frères d’avoir
embrassé le parti d’Abou Mohammed Ibn Tafraguîn [90],
grand cheikh des Almohades [91],
qui venait d’usurper le pouvoir à Tunis, au
*377 détriment de son pupille, le sultan Abou Ishac, fils du sultan Abou
Yahya, fait qui s’est passé presque de nos jours :
Khaled le Généreux va parler à bon escient
et tenir un discours digne d’un orateur ; il a toujours parlé raison. Sa
harangue sera magistrale et pleine de sens ; il ne s’y embrouillera
pas ; il ne rétractera jamais ce qu’il y aura dit : J’ai conçu une
noble [92] pensée, (et je l’exprime ici) sans que le
besoin m’y force et sans vouloir causer des troubles dont le blâme
rejaillirait (sur moi). (Cette pensée) j’y tiens de tout mon cœur ; c’est
une vraie trouvaille, un trésor fourni par la réflexion, et tout ce qui est
trésor se retrouve (plus tôt ou plus tard) [93]. Je parle en déclarant ouvertement ce que
j’ai besoin (de dire au sujet de la conduite) tenue par des hommes de notre
tribu, proches parents de notre famille ; par les enfants de Kaab [94], ceux qui nous tiennent de près par les
liens du sang [95] ; par nos cousins, tant les jeunes
gens que les vieillards. Après la conquête du pays, nous avons accordé à
plusieurs d’entre eux la sincérité de notre amitié et la plénitude de notre
hospitalité ; nous en avons soutenu d’autres contre leurs p.418 *378 adversaires, et vous savez que ma parole est frappante de vérité. A
d’autres nous avons donné comme rétribution une partie de nos possessions, et
cela est resté inscrit au fond de (leur) cœur [96]. D’autres, se trouvant dans le besoin,
sont venus nous trouver et obtenir de notre magnanimité une abondance de dons.
D’autres avaient été insolents à notre égard [97] et nous faisaient du mal [98], mais nous le subissions [99] jusqu’à ce que leurs préoccupations se
dissipassent. Ils renonçaient (quelquefois) à leurs viles (tentatives) que nous
regardions comme des actes de folie [100], mais parfois ils se faisaient bien
redouter. Un autre, simple serviteur [101] d’un homme puissant, se plaignait de ce
qu’on lui avait fermé la porte de la skîfa [102] où se passaient nos délibérations ;
nous l’en avions renvoyé, et il demandait à y rentrer malgré le maître d’El‑Baleki [103] et malgré Dîab [104]. Et cependant nous avions toujours essayé
de les exalter, et jamais nous n’avions posé de voiles sur nos figures afin de
leur faire une trahison. Nous avons su défendre comme *379 un parc réservé le territoire de Tarchîch [105] ; et cela en risquant (nos)
chevaux [106] et notre cou. (Nous avons défendu) une
plaine dans les États qui avaient échappé à la domination de leur souverain,
lui qui avait (cependant) des dents (pour se faire respecter) [107] ; (nous l’avons défendue) au moyen de
la résistance offerte par quelques chefs de notre tribu, les Beni Kaab [108]. Leur appui nous suffisait quand il
fallait résister aux coalitions de nos ennemis, et notre aide les délivrait des
entraves que les vicissitudes de la fortune leur imposaient. (Cela continua)
jusqu’à ce que [109] ceux d’entre eux qui ne possédaient pas un
seul agneau [110] se trouvassent p.419 dans l’aisance et comblés de biens [111]. Ils eurent alors pour montures des
chameaux [112] qu’on désignait (à cause de leur
excellence) par le nom du peuple qui les avait élevés, et ils portaient des
vêtements en soie de diverses couleurs. Ils poussaient devant eux, à travers
les pays, non pas (un petit nombre) de bêtes de somme (réservées) pour la
propagation de l’espèce [113], mais de nombreux troupeaux dont chaque
individu était chargé de son bât [114]. Dans leurs diverses entreprises, ils gagnaient
de ces vastes trésors qui ne se laissent acquérir qu’en temps opportun ;
et ils devenaient semblables aux Barmékides d’autrefois, eux qui, du temps de *380 Dîab (Ibn Ghanem), n’auraient été que de nouvelles lunes (que l’on
distinguerait à peine). Ils furent pour nous des cuirasses chaque fois qu’un
danger nous donnait des inquiétudes, chaque fois que [115] reluisait (à nos yeux) le tison employé
par l’ennemi pour allumer le (feu de la guerre). Ils ont (cependant) abandonné
leurs demeures pendant les ténèbres de la nuit ; (mais) ils ne craignirent
pas [116] des reproches, car aucun blâme ne saurait
atteindre la demeure des hommes généreux. Ils revêtirent (les gens de) leur
tribu d’excellents habits, afin de les garantir (contre les intempéries de
l’air), et eux, — si on le savait, — se couvraient de mauvaises tuniques. Parmi
eux se trouve un homme paresseux et négligent, qui ne sait ce qui se passe et
qui, à mon avis, a perdu l’esprit [117] ; il a une mauvaise opinion de nous,
bien que nous ne la méritions pas ; souhaitons qu’il trouve plusieurs
manières d’exercer la bienfaisance. Il est dans l’erreur, et celui qui
l’imite [118], en nourrissant des pensées injurieuses et
en affirmant comme vraies des suppositions déshonorantes, est un homme vil.
Comment me consoler [119] (de la mort) du héros Bou
Mohammed (Ibn Tafraguîn), de celui qui donnait des millions sans les
compter ? Les gens du peuple sont dans l’affliction [120], et, *381 tant qu’il
vivait [121], ils pensaient que sa disparition [122] (du monde) serait aussi funeste que celle
des nuages (qui répandent la fertilité). Ils couraient (naguère) p.420 pour chercher des abreuvoirs sous ces nuages, mais l’eau qu’ils
espéraient trouver n’était qu’un mirage. Quand il faisait des dons [123], il savait offrir ce qui était convenable,
et, même dans ses moindres cadeaux, il observait la juste mesure. Nous
renonçons à l’espoir de pouvoir nous consoler depuis qu’il a été frappé par les
flèches [124] de la mort. Quand il tenait Tarchîch sous
ses pieds, cette (ville), toute grande qu’elle était, ne lui suffisait
pas [125] (pour marchepied), et l’épouvante (de ses
ennemis) aboutissait à l’affliction. Bientôt il va la quitter [126] …. laissant après lui des jeunes filles
aux regards séduisants, à la taille flexible, aux gestes agaçants, qu’on avait
élevées avec soin à l’abri de voiles et de rideaux. Quand elles se donnaient
des airs de fierté, il montrait de l’orgueil, et il se laissait emporter par
l’amour quand elles chantaient leur passion en jouant du tympanon et du
rebec [127]. Elles le séduisaient [128] au point qu’il ne savait plus où il en
était, et quelquefois il badinait (avec elles) comme s’il était [129] un jeune homme. Auprès d’elles il passait
des temps (heureux) ; tout obéissait à *382 ses
ordres ; les mets (de sa table) lui semblaient délicieux, et ce qu’il
buvait lui paraissait exquis. Mais les amours d’autrefois sont maintenant
défendus pour Ibn Tafraguîn, et, à leur place, il n’a reçu que la mort [130]. Il avait un jugement solide et de la
prévoyance [131] ; il se lançait (dans les affaires
comme) une galère sur l’Océan profond [132]. Dans les événements imprévus, il faut des
hommes d’action [133] et de grands chefs, jusqu’à ce que les
ennemis [134] restent (taillés) en pièces (sur le champ
de bataille), jusqu’à ce que le marché dont les denrées nous sont confiées soit
bien achalandé [135], que nos lances altérées de sang et nos
carquois soient teints en rouge, et que le jeune homme qui en veut à notre
domination fortunée se repente (de sa tentative) [136] et ne se retire pas avec les dents en bon
état. Vous qui gardez le pain en attendant des assaisonnements, vous avez
tort : que la mie vous serve d’assaisonnement quand il fait du
sirocco [137].
p.421 Voici un poème composé par Ali
Ibn Omar Ibn Ibrahîm, un des chefs actuels des Beni Amer [138],
tribu formant une branche de celle des Zoghba [139].
Dans cette pièce, il reproche à ses cousins leur désir d’obtenir le haut
commandement (et de dominer) sur le reste de la famille [140].
*383 (Ali Ibn Omar a composé ces) petits vers pleins de douceur et
formant un discours versifié [141] ; (ils sont) beaux comme des perles
qu’un artisan tient dans sa main pendant qu’il les range sur un fil de soie.
*388 Donnons ici un spécimen des vers
composés par les Arabes‑Bédouins qui se tiennent dans cette partie de la Syrie
qui s’appelle le Hauran. Une femme, dont le mari venait d’être assassiné,
composa ce morceau et l’envoya à des membres de la tribu de Caüs, qui avaient
promis à cet homme aide et protection. Dans cette pièce, elle les pousse à la
vengeance :
Omm Selama, la jeune femme de la tribu,
parle de sa propre personne (et dit) : Puisse Dieu remplir d’effroi celui
qui ne la plaint pas ! Elle passe de longues nuits dans l’affliction, sans
pouvoir se faire au sommeil, et elle rencontre la misère [142] partout où elle se tourne. (Elle se
plaint) de ce qui est arrivé à sa maison et à sa famille ; leur position
s’est changée en un clin d’œil par suite d’un coup qui les a séparées de leur
chef [143]. Vous tous qui appartenez à la tribu de
Caïs, vous avez perdu Chihab ed‑Dîn, et vous ne songez pas à le venger !
Est-ce là tenir ses promesses ? J’ai dit, quand ils m’envoyèrent une
lettre pour me consoler et pour éteindre les étincelles du feu qui consumait
mon cœur [144]. Est‑ce [145] p.422 bien le temps de
soigner ses cheveux et sa barbe, quand on n’a pas protégé la beauté des jeunes
femmes à la peau blanche ?
La pièce suivante fut composée par un Arabe‑Bédouin de la tribu de
Helba, branche de la tribu d’El‑Djodami, laquelle est établie en Égypte [146].
*389
Les poésies de ce genre abondent chez les Bédouins et se transmettent *390 des uns aux autres. Certaines tribus les
cultivent, mais d’autres dédaignent de s’en occuper, ainsi que nous l’avons
déjà fait observer dans notre chapitre sur la poésie. Le mépris de cette espèce
de composition est partagé par la plupart des grands chefs, ceux, par exemple,
des tribus de Rîah, Zoghba et Soleïm [147].
Les habitants de l’Espagne avaient déjà beaucoup composé en
vers : ils venaient de régulariser les procédés de la poésie, de fixer le
caractère de ses divers genres et de porter au plus haut degré l’art de
l’embellir, quand leurs poètes, à une époque assez moderne, en découvrirent
une nouvelle branche [149],
à laquelle ils donnèrent le nom de p.423 mowascheh (ode). Dans les poèmes de
cette espèce, ils faisaient correspondre d’une manière régulière les simt
aux simt et les ghosn aux ghosn [150].
Ils ont beaucoup composé de ces pièces sur un grand nombre de sujets. Un nombre
déterminé (de vers forme une stance et) compte, chez eux, pour un seul vers. Le
même nombre de rimes et les mêmes mesures qu’on donne aux ghosn (de la
première stance) se reproduisent invariablement (dans les stances suivantes)
jusqu’à la fin de la pièce, laquelle se compose ordinairement de sept vers (ou
stances). Chacun de ces vers renferme plusieurs ghosn, dont le nombre est fixé, par la fantaisie du poète et par le
système (de versification qu’il adopte). Dans les poèmes de cette espèce, on
célèbre les charmes de la bien‑aimée et les vertus des grands personnages,
ainsi que cela se fait dans les cacîdas. Ces
compositions, dans lesquelles la grâce et l’élégance sont portées jusqu’aux
dernières limites, faisaient les délices de tout le monde, et, comme elles
étaient d’une forme facile à saisir, les grands et les petits s’empressaient
également de les apprendre par cœur.
Celui qui, le premier, en Espagne, imagina ce genre de poème, fut
Mocaddem Ibn Moafer en‑Neirîzi [151],
un des poètes favoris de l’émir *391 Abd
Allah Ibn Mohammed el‑Merouani [152].
Abd Allah Ibn Abd Rabbou, l’auteur de l’Icd [153],
apprit d’Ibn el‑Moafer à composer dans ce style ; mais leur souvenir
(comme compositeurs d’odes) ne s’est pas p.424
conservé, et leurs mowaschehas ont
fini par tomber dans l’oubli. Le premier qui se distingua réellement dans
cette partie se montra plus tard ; il se nommait Eïbada tel‑Cazzâz, et
était le poète en titre d’El‑Motacem Ibn Somadih, souverain d’Alméria [154].
L’illustre savant El‑Batalyauci [155] raconte qu’il avait entendu Abou Bekr Ibn Zoheïr prononcer ces paroles : « Tous les
compositeurs d’odes ne sont que de petits garçons auprès d’Eïbada tel‑Cazzâz ; »
observation qu’il avait faite en rencontrant par hasard une pièce dans laquelle celui-ci s’exprimait ainsi (en décrivant les
charmes de sa bien‑aimée)
Une pleine lune, un soleil du matin, une
tige (qui pousse) dans les sables, douce à sentir comme le musc : comme
elle est parfaite ! comme elle brille ! comme elle est
florissante ! comme elle répand des parfums ! Assurément celui qui
(la) regarde en deviendra amoureux et ne l’obtiendra pas [156].
Eïbada florissait dans les temps où chaque province de l’Espagne était
régie par un souverain indépendant. On assure qu’aucun de ses contemporains ne
l’a dépassé dans la composition d’odes. Après lui vint en seconde ligne (Abou Bekr
Mohammed) Ibn Arfâ Raçou, poète en titre d’El-Mamoun Ibn Dhi’n‑Noun, souverain
de Tolède. On a beaucoup admiré la belle manière dont il tourna le commencement
de l’ode (mowascheha) qui fit sa réputation. Voici le passage :
Le luth a retenti de sons admirables, les
ruisseaux ont arrosé les pelouses des jardins.
On admire aussi la fin de cette pièce, où il dit (à la bien‑aimée) :
p.425
Tu marches fièrement sans [157] (nous) saluer ; on te prendrait [158] pour Al-Mamoun Yahya Ibn Dhi ’n‑Noun,
celui qui est l’effroi des escadrons (ennemis) [159].
*392 Ensuite, sous le gouvernement
des Almoravides, une autre troupe de poètes entra dans la lice et fit des
choses admirables. Les chefs de cette troupe étaient Yahya Ibn Baki [160]
et l’Aveugle de Tudèle (El-Aama
et‑Toleïli) [161]. Celui-ci a dit dans une de ses odes (mowascheha) dorées :
Comment me consoler, quand les traces (du
campement abandonné) inspirent la tristesse ? La caravane est (maintenant)
au milieu du désert et emporte les tendres vierges qui viennent de partir [162].
On a entendu dire à plusieurs cheikhs
qu’en Espagne les amateurs de ce genre de poésie racontent l’anecdote
suivante : Plusieurs poètes se trouvaient dans une réunion à Séville.
Chacun d’eux avait apporté une ode dont il avait soigné la composition autant
que possible. L’Aveugle de Tudèle s’avança pour faire entendre la sienne, qui
était la célèbre ode dont les premiers mots sont :
En riant, elle montre des perles ; en
se dévoilant, elle laisse voir une lune ; le monde est trop étroit pour la
contenir, et cependant elle se trouve renfermée dans mon cœur [163].
A peine eut‑il prononcé ces lignes qu’Ibn Baki déchira sa propre ode,
et les autres poètes suivirent son exemple.
El‑Aalem el‑Batalyauci rapporte qu’il avait entendu dire à Ibn
Zohr [164] :
« Les odes d’aucun poète n’ont jamais excité ma jalousie, à l’exception
d’une, composée par Ibn Baki. Quand je l’entendis pour la première fois, je
ressentis vivement cette passion. » En voici le commencement :
Ne vois‑tu pas Ahmad, dans la hauteur de sa
gloire, sans rival ! L’Occident l’a produit ; montre‑moi son pareil,
pays de l’Orient !
Dans le siècle où ces deux poètes florissaient, il en parut un autre
nommé Abou Bekr el‑Abiad [165],
dont les odes se distinguaient par un *393 style
simple et naturel. Un autre de leurs contemporains fut le philosophe Abou Bekr
Ibn Baddja [166],
auteur des airs (telhîn) qui sont si bien connus. Il y a une anecdote
assez répandue que je veux rapporter ici : Ibn Baddja, se trouvant à une
partie (de plaisir) chez son patron, Ibn Tifelouît [167],
seigneur de Saragosse, remit à une des chanteuses appartenant à ce prince une
ode qui commençait ainsi : p.427
Marche (avec fierté) en traînant ta robe
partout où elle (ta bien‑aimée) a traîné la sienne ; et ajoute à l’ivresse
(que ses charmes t’inspirent [168]) l’ivresse (qui provient du vin).
Le prince manifesta par ses gestes le plaisir que cet éloge lui causait.
La pièce se terminait par ces vers :
Dieu a préparé un drapeau toujours victorieux pour l’illustre émir
Abou Bekr.
Lorsque ce telhîn frappa son
oreille, il s’écria : Oh !
quelle jouissance ! » et déchira ses vêtements (tant il était ravi).
« Tu as commencé admirablement », dit‑il, « et tu as fini de
même. » Il fit alors un serment des plus solennels, en déclarant qu’Ibn
Baddja ne rentrerait chez lui qu’en marchant sur de l’or. Le poète, craignant
que cela n’eût des conséquences graves, imagina un moyen d’éluder le serment
et se fit mettre de l’or dans les souliers avant de s’en aller.
Abou ’l‑Khattab Ibn Zohr raconte ce qui suit : Dans une
réunion qui se tenait chez Abou Bekr Ibn Zohr [169],
on causait d’Abou Bekr el-Abiad, l’auteur de l’ode dont nous avons parlé. Un
de ceux qui étaient présents ayant dit que ce poète n’était pas très fort, Ibn
Zohr lui répondit en ces termes : « Comment ! vous déprisez
l’homme qui a composé ces vers :
Je n’ai jamais eu du plaisir à boire du vin
dans une praire couverte de fleurs, à moins qu’(une beauté), dont la taille
flexible se balance quand elle se retire au point du jour, n’eût rempli sa
promesse, le soir, et ne m’eût dit, au matin : *394 « Pourquoi le vin a‑t‑il souffleté mes joues ? que me
veut le vent du nord ? » Il souffla, et devant lui se pencha ce
tendron si bien proportionné, que j’avais enveloppé dans mon manteau [170]. (Elle est) un de ces êtres qui tuent les
cœurs ; elle marche en nous inspirant des soucis. Puissent ses œillades
nous rejeter encore p.428 dans le péché ! Douces lèvres qui
recouvrez ses dents, donnez du rafraîchissement à (un amant) qui brûle de
soif, qui est épris d’amour et malade, qui ne trahira jamais ses promesses, et
qui, dans tous les cas, ne cessera d’espérer que tu viendras le trouver, bien
que tu lui montres de l’indifférence [171].
Après ces poètes, et dans les premiers temps de la dynastie almohade,
parut Mohammed Ibn Abi ’l-Fadl Ibn Cheref — « J’ai reconnu, dit
El-Hacen Ibn Doueïrîda [172],
le faire de Hatem Ibn Saîd [173]
dans ce vers :
Le convive enjoué et le vin, c’est la lune en conjonction avec le
soleil. »
(Citons aussi) Ibn Herdous [174],
qui a dit :
O nuit de notre réunion et de mon bonheur ! reviens, je t’en
supplie !
(Et mentionnons) Ibn Mouhel, à qui nous devons ce morceau :
Une fête ne consiste pas à porter une belle
robe avec un manteau et à respirer des parfums ; la véritable fête, c’est de
se trouver avec la bien‑aimée.
*395 (Nommons) encore [175]
Abou Ishac ed‑Douîni [176].
Ibn Saîd [177]
dit avoir entendu Abou ’l-Hacen Sehl Ibn Malek [178] raconter ce qui suit : p.429 J’entrai une fois chez Ibn Zohr, qui était
alors très âgé, et je portais l’habillement de la campagne, parce que je
demeurais dans le château d’Estepa [179].
Comme il (Ibn Zohr) ne me connaissait pas, je m’assis au dernier rang de
l’assemblée. Dans la suite de la conversation, je fus amené à réciter une ode
de ma composition, dans laquelle se trouvaient ces vers :
Le collyre des ténèbres disparaît de l’œil
de l’aurore, au matin [180]. Le poignet de la rivière s’est entouré de
manchettes vertes, formées par ses bords.
Quand Ibn Zohr eut entendu ces paroles, il
tressaillit et me dit : Est‑ce vous qui avez fait cela ? — Je lui
répondis : « Mettez‑moi à l’épreuve ! » — Qui êtes‑vous ? »
me dit‑il. — « Un tel », dis‑je. — « Montez à la première place,
me dit‑il, par Allah ! je ne vous connaissais pas ! » — Ibn
Saîd dit : « A la tête de la troupe qui suivit immédiatement ceux‑là
se trouvait Abou Bekr Ibn Zohr, poète dont les odes se sont répandues tant en
Orient qu’en Occident. » Il ajouta : « J’entendis dire à
Abou ’l-Hacen Sehl Ibn Malek qu’on avait demandé à Ibn Zohr quelle était
l’ode de sa composition qu’il regardait comme la plus originale, et il répondit
que c’était celle‑ci :
Pourquoi cet homme fou d’amour [181] ne revient‑il pas de son ivresse ?
Oh ! comme il est ivre ! Pouvons‑nous ramener les (beaux) jours et
les nuits (que nous avons passés) auprès du canal ? Voilà qu’on aperçoit
dans le zéphyr odorant le (parfum du). musc de Darîn [182]. Peu s’en faut que la beauté de ce lieu
charmant ne nous donne une nouvelle vie ! (Voici) un fleuve ombragé de
beaux arbres dont les p.430 branches sont chargées de feuillage, et
l’on voit l’eau qui coule emporter sur sa surface ou dans son sein une récolte
de (feuilles de) myrte [183]. »
*396 Après lui, le poète le plus
distingué fut Ibn Haiyoun, l’auteur de la chanson (zedjel) si bien connue qui commence
ainsi :
A chaque instant elle ajuste une flèche, et
tire, à sa volonté, soit avec la main, soit avec l’œil.
Il indique encore ce double avantage dans le vers suivant :
J’ai été créée belle et suis connue comme
un archer habile : je ne cesse pas de combattre même pendant un
instant ; je fais avec mes deux yeux ce que ma main fait avec les
flèches [184].
Il y avait avec eux à Grenade un autre poète qui se distinguait
beaucoup et qui se nommait El-Mohr Ibn Ferès (poulain, , fils de jument) [185].
Ibn Saîd dit : Voici de ses vers :
Grand Dieu ! quelle journée charmante
nous avons passée dans les prairies, sur le bord de la rivière de Hims
(Séville) ! Ensuite nous retournâmes vers l’embouchure du canal, en
brisant les cachets de musc afin de dégager le vin couleur d’or ; (et
cela) pendant que la main des ténèbres repliait la robe du soir.
Quand Ibn Zohr entendit ces vers, il s’écria : « Comme nous
sommes loin (d’avoir eu la pensée) de cette robe ! » Il y avait avant
lui (Ibn Ferès), dans la même ville, un poète nommé Motarref. Ibn Saîd
rapporte (à son sujet) l’anecdote suivante, qu’il avait apprise de son
père : Motarref entra un jour chez Ibn Ferès, et celui-ci se leva et le
reçut avec de grandes marques d’honneur. « Ne faites pas cela, » lui dit
Matarref. « Comment, dit Ibn Ferès, ne me lèverais‑je pas pour celui qui
a dit : p.431 *397
Des cœurs atteints par des regards qui
blessent, comment peuvent‑ils exister sans souffrir ?
Après ceux‑ci parut à Murcie Ibn Hazmoun. Ibn ar‑Raïs a rapporté que
Yahya el‑Khazradji, s’étant présenté à une réunion où Ibn Hazmoun se trouvait,
lui récita une ode de sa composition, et que celui-ci lui dit : « Une
ode n’est pas ode à moins qu’elle ne soit exempte de tout ce qui sent le
travail. » Yahya lui en demanda un exemple, et Ibn Hazmoun lui récita une
de ses propres pièces que voici :
O toi qui m’évites ! y a‑t‑il un
chemin par lequel on puisse parvenir à te joindre ? Penses‑tu que le cœur
d’un amant affligé puisse trouver du repos après avoir ressenti de l’amour pour
toi [186] ?
Signalons encore Abou ’l-Hacen Sehl Ibn Malek, natif de Grenade,
au sujet de qui Ibn Saîd raconte ce qui suit : « Mon père admirait
beaucoup la manière dont Sehl s’était exprimé dans le morceau suivant :
Le jour parut dans l’Orient comme un
torrent et se répandit comme une mer sur toutes les contrées. Aussi les
pleureuses d’entre les (tourterelles) fauves se sont appelées les unes les
autres ; ne vois‑tu pas qu’elles craignent d’être noyées et passent la
matinée à se lamenter du haut du feuillage ? »
Vers la même époque, (le poète) Abou ’l-Hacen Ibn Fadl se distinguait
à Cordoue. Ibn Saîd raconte qu’il entendit dire à son père ce qui suit :
« J’étais présent quand Sehl Ibn Malek adressa ces paroles à Ibn
Fadl : Certes, Ibn Fadl ! vous avez obtenu la prééminence (fadl)
sur les autres compositeurs d’odes par la pièce que voici :
Oh ! comme je regrette les temps
passés, (maintenant que) dans le soir (de la vie) l’amour est parti et
fini ! Je reste seul, malgré moi et sans le vouloir ; je passe mes nuits
(comme si j’étais) sur des charbons ardents. Je salue, en pensée, les restes de
cette demeure abandonnée ; je baise, en imagination, les traces (laissées
par les habitants). »
*398 Le même (narrateur) rapporte ce
qui suit : « Plus d’une fois [187]
p.432 j’entendis Abou Bekr es‑Sabouni
réciter au maître (ostad) Abou ’l-Hacen ed‑Debbadj [188]
des odes qu’il avait composées, sans que celui-ci lui eût jamais dit : A
la bonne heure ! Ce ne fut qu’après avoir entendu les vers suivants qu’il
prononça cette parole flatteuse :
J’en jure par mon amour pour celle qui me
témoigne de l’aversion, que les nuits de l’homme qui est vaincu par l’amour
n’ont pas de matinées ; il n’est pas donné à tout le monde de se
réjouir [189] à l’aspect de l’aurore. Je pense, chaque
nuit, que le jour ne viendra jamais. O nuits que je passe ! vous êtes
assurément éternelles ; ou bien, on a lié les ailes de l’aigle (céleste)
afin que les étoiles du ciel ne poursuivent pas leur carrière [190].
Voici une des odes [191]
d’Ibn es‑Sabouni :
Voyez l’état de celui que l’amour a fait
captif et qui se trouve livré au chagrin et à la tristesse. Malheur à
lui ! celle qui devait le guérir l’a rendu malade. La bien‑aimée l’a
traité avec dédain, puis le sommeil s’est éloigné de lui à l’exemple de cette
(cruelle). Le sommeil a fui mes paupières, mais je ne m’en plaindrais pas, s’il
ne m’avait empêché de voir en songe la personne que j’aime. Le rendez‑vous
qu’elle m’avait donné par caprice, hélas ! quel triste rendez‑vous [192] ! Mais je ne saurais faire des
reproches à celle qui ne veut pas se montrer à moi, soit en réalité, soit en
songe [193].
Ibn Khalef el‑Djezaïri (natif d’Alger) s’est fait un nom en Mauritanie
par l’ode (qui commence ainsi) : p.433 *399
La main de la matinée a battu le briquet de la lumière sur l’amadou
des fleurs.
Ibn Khazer de Bougie s’est distingué par l’ode (dont voici le commencement) :
Une des meilleures odes qu’on ait composées dans les temps modernes a
pour auteur Ibn Sehl, poète qui habitait Séville et qui s’était ensuite fixé à
Ceuta [195].
Elle (commence) ainsi :
La gazelle du parc bien gardé savait‑elle
qu’en prenant le cœur de son amant pour une tanière elle l’avait embrasé ?
Ce (malheureux) est dans le feu et dans l’agitation ; il est comme la
braise dont se joue le souffle du zéphyr.
Notre ami le vizir Abou Abd Allah Ibn el‑Khatîb, qui fut, de son
époque, le plus grand poète de l’Espagne et du Maghreb, composa sur la même
forme que l’ode précédente [196]
une autre ode que je donne ici :
Quand [197] les nuages (bienfaisants) répandent leurs
eaux, puissent les averses t’arroser copieusement, ô temps (fortuné) qui me
réunira, en Andalousie, (avec toi, ma bien‑aimée). Mes rencontres avec toi
n’ont cependant eu lieu qu’en songe, pendant mon sommeil ; ou bien elles
s’effectuent à la dérobée, par des tours d’adresse. Voilà que le temps (nous)
amène une diversité de souhaits qui s’avancent les uns sur tes traces des
autres ; (elles viennent) isolément ou deux à *400 deux, (et forment) des groupes semblables aux bandes (de voyageurs)
dont la présence est appelée par la fête (de la Mecque). Les pluies ont revêtu
la prairie d’un double éclat et en ont fait sourire les fleurs. L’anémone (noman) annonce (les bienfaits) qu’elle a reçus de l’eau du ciel (ma es‑sema),
de même que Malek annonça (les communications) qu’il avait reçues d’Anès [198], et elle a obtenu de la beauté un
habillement rayé, un vêtement magnifique, dont elle se montre p.434 justement fière. (Cela se passa) dans certaines nuits, pendant que
je cachais le secret de mon amour sous le voile des ténèbres, (qui auraient été
plus profondes) s’il n’y avait pas eu là de jolies figures qui brillaient comme
des soleils. Alors notre coupe, cet astre (brillant), se penchait (vers nos
mains) et faisait descendre sur nous, en ligne directe, ses influences
heureuses. (J’avais alors à satisfaire) un désir impérieux dont le seul défaut
était de passer en un clin d’œil ; au moment même où notre familiarité
avait un peu de douceur, la matinée survenait à l’improviste, ainsi qu’un
gardien jaloux qui fait le guet [199]. Sont‑ce les astres (dont la lumière)
vient nous surprendre ? ou bien (sont‑ce) les yeux (fleurs) du narcisse
dont nous ressentons les effets ? Combien (est heureux) l’homme dégagé
(de soucis) sur lequel la prairie agit (avec tous ses charmes *401 pendant que) les fleurs profitent de sa distraction (pour
s’épanouir), et que, assurées contre ses artifices, elles ne le craignent
plus ! Le ruisseau cause avec le gravier (de son lit) et chaque amant se
retire à part avec son amie. On voit la rose, fâchée et jalouse (de la beauté
de ma bien‑aimée), se revêtir, dans sa colère, de cette (couleur rouge) qu’elle
se plaît à porter ; on y voit le myrte agir avec prudence et
circonspection, pour entendre, à la dérobée, avec ses oreilles de cheval [200]. Gens de la tribu campée sur le (bord du)
fleuve d’El‑Ghada ! vous que j’avais cependant logés dans mon cœur !
la plaine, toute large qu’elle soit, est trop resserrée pour contenir l’amour
que je vous porte ; (à la regarder) depuis son bord oriental jusqu’à son
bord occidental, elle ne me paraît rien. Rétablissons le pacte d’amitié qui
existait (entre nous) autrefois ; délivrez votre captif de son
chagrin ; craignez Dieu et rendez la vie à un amant passionné dont l’âme
s’exhale, soupir par soupir. Mû par un noble motif, il vous a consacré son
cœur ; consentirez‑vous à laisser ce gage dépérir ? Parmi vous il y a
une personne *402 qui touche de près à mon cœur et lui
inspire des souhaits, bien qu’elle soit loin de moi. Cette lune (pleine de
beauté) s’est levée dans l’Occident, et, bien que son aspect soit fortuné, elle
porte malheur à celui qui l’aime. L’homme vertueux et le criminel écoutent avec
une égale indifférence les promesses (de Dieu) et ses menaces, aussitôt qu’ils
ont ressenti de l’amour pour cette belle, aux regards enchanteurs, aux lèvres
de miel ; qui, (par ses charmes, pénètre et) parcourt notre âme ainsi que
la respiration parcourt (le corps). Elle visa avec sa flèche, nomma (le but
qu’elle voulait frapper) et tira son arc ; dès lors mon cœur devint la
proie d’une (passion) qui le dévora. Bien qu’elle soit tyrannique et qu’elle p.435 trompe les espérances de l’amant, au point que le cœur de celui-ci
est consumé par l’ardeur de la passion, elle est l’objet que l’âme estime le
plus : aimer sa maîtresse n’est pas un péché. Ses ordres agissent sur tous
les cœurs, sur tous les seins dont elle a fait le tourment, et y trouvent une
prompte obéissance. Ses regards dominent sur l’âme avec une puissance absolue.
Jamais, pendant que ses amants poussaient leurs derniers soupirs, jamais elle
n’a pensé à cet Être qui venge les opprimés en punissant les oppresseurs et qui
donne aux âmes vertueuses et aux âmes criminelles la rétribution qui leur est
due. Qu’a‑t‑il donc, *403 mon cœur ? Chaque fois que le zéphyr
fait sentir son haleine [201], une nouvelle passion vient s’y
installer ! La tablette qui porte inscrite la destinée de l’amant renferme
ces paroles de Dieu [202] :
Certes le tourment que j’infligerai sera sévère. (Cette belle) a attiré sur
moi les soucis et les maux, de sorte que, entouré de chagrin, j’ai éprouvé des
souffrances atroces. (La personne) qui a porté le trouble dans [203] mon cœur et qui l’a enflammé, ainsi que le
feu embrase un faisceau de bois desséché, ne m’a rien laissé de la vie,
excepté un dernier soupir [204] qui persiste encore, de même que les
dernières lueurs du jour persistent après l’invasion des ténèbres. Résigne‑toi,
mon âme, aux décrets du destin ; emploie le moment actuel à opérer ma
conversion et à tourner mon cœur vers Dieu. Ne pense plus aux jours que j’ai
passés à reprocher (aux belles leur cruauté) ou à jouir de faveurs qui sont
maintenant finies pour moi. Adresse la parole au prince favorisé de Dieu, à
celui qui a reçu par inspiration cette grâce qui est annoncée dans le livre
saint, à cet homme généreux qui est parvenu au faîte (de la gloire) et qui a
grandi (dans les honneurs), au lion du château, au soleil de l’assemblée, à *404 celui sur qui l’aide divine est descendue ainsi que descendirent
les révélations que l’esprit de la Sainteté porta (à notre Prophète) [205].
On voit aux odes des Orientaux que ce genre de composition leur
coûtait un travail d’esprit pénible. Une des meilleures qu’ils aient produites
est celle qui a pour auteur Ibn Sena ’l-Molk [206]
et qui est aussi bien connue en Occident qu’en Orient. Elle commence
ainsi :
Ma bien‑aimée, ayant enlevé le voile de
lumière qui couvrait son visage, te p.436 laisse voir du musc (c’est‑à‑dire des sourcils noirs) sur du camphre (c’est‑à‑dire une peau blanche), au milieu
d’une fleur de grenade (c’est‑à‑dire la rougeur des joues).
Nuages ! entourez de bijoux (c’est‑à‑dire de fleurs) les couronnes
(c’est-à‑dire les bocages) que portent ces collines, et donnez‑leur pour
bracelets les détours du fleuve.
Lorsque l’art de composer des odes se fut répandu parmi les Espagnols,
tout le monde s’y appliqua à cause de la facilité du genre, de l’élégance de sa
forme et de la correspondance qui régnait, entre les vers ; et les
habitants des villes se mirent à tisser sur ce modèle et à ranger des vers
d’après ce système. Ils y employèrent leur dialecte ordinaire, celui qui se
parle dans les villes, et ne s’y astreignirent pas à l’observation des règles
de la syntaxe désinentielle. Ils développèrent aussi une nouvelle branche de
poésie à laquelle ils donnèrent le nom de zedjel
(ballade) et dont la versification conserve jusqu’à ce jour la forme qu’ils
avaient adoptée (au commencement). Dans ce genre de poésie, ils ont produit des
pièces admirables, et l’expression des idées y est aussi parfaite que leur
langage corrompu le permet. Le premier qui se distingua dans cette voie fut
Abou Bekr Ibn Gozman. Il est vrai qu’avant lui on avait récité des ballades en
Espagne, mais la douceur du style, la manière élégante dont on y énonçait ses
pensées et la beauté dont ce genre de composition était susceptible ne furent
appréciées qu’au temps de ce poète. Il vivait sous les Almoravides et tenait,
sans contredit, la première place *405 parmi
les compositeurs de ballades. « Quant à ses zedjel, » dit Ibn Saîd, « je les ai entendu
réciter plus souvent à Baghdad que dans les villes de l’Occident. » Il dit
ailleurs : « J’ai entendu déclarer à Abou ’l-Hacen Ibn Djahder
de Séville, le premier chansonnier de notre époque, que personne, parmi les
poètes les plus capables dans ce genre, n’a eu une inspiration pareille à celle
qui survint à Ibn Gozman, le grand maître de l’art. Étant sorti, un jour, avec
quelques amis, pour faire une promenade d’agrément, il s’assit avec eux sous un
berceau de feuillage, en face duquel se voyait la figure d’un lion, en
marbre ; de la gueule de ce lion s’échappait une masse d’eau qui allait p.437 tomber sur une suite de dalles en pierre,
formant escalier. Il composa sur ce sujet le morceau suivant :
Un berceau établi au‑dessus d’une estrade
et lui servant de portique ; et un lion, qui a avalé un serpent gros comme
la jambe et qui ouvre la bouche comme un homme qui va rendre le dernier
soupir [207]. (Le reptile, ) s’étant échappé de là, va
courir sur les dalles en jetant les hauts cris.
Bien qu’Ibn Gozman résidât habituellement à Cordoue, il se rendait
très souvent à Séville pour en revoir le fleuve. Un certain vendredi, plusieurs
poètes d’une grande réputation comme faiseurs de zedjels s’étaient réunis pour faire une promenade sur l’eau, et
avec eux se trouvait un jeune garçon d’une figure charmante et appartenant à
une des familles les plus riches et les plus respectables de la ville. Étant
partis en bateau pour aller à la pêche, ils se mirent à improviser des vers
dont cette partie de plaisir faisait le sujet, et Eïça’l-Belid commença, par
ces lignes :
Mon cœur désire se soustraire (à la
tyrannie de la personne qu’il aime), bien qu’il y ait déjà échappé. Mais
l’amour l’a encore ramené dans le voisinage *406 (du danger) [208]. Voyez cet infortuné, accablé du poids de
sa misère ; il a l’esprit troublé à cause du grand malheur qui vient de
l’atteindre [209]. Certes, il s’attristait dans l’absence
de ces beaux yeux noirs, et, cependant, ce sont ces yeux noirs qui l’ont
amaigri.
Abou Omar Ibn [210]
ez‑Zahed, natif de Séville, récita ensuite ce morceau :
Il est pris, ainsi que se laisse prendre
celui qui s’abandonne à l’océan de ses passions. Tu vois ce qui l’a jeté dans
les maux et les tourments : il eut la fantaisie de [211] badiner avec l’amour, c’est un jeu qui a
fait périr bien du monde.
p.438 Abou ’l-Hacen el‑Mocri,
natif de Dénia, prononça ensuite ces vers :
La belle journée ! tous les traits qui
la distinguaient me remplissent encore d’admiration. Le vin et les belles circulaient
autour de moi pendant que les amis
faisaient la sieste sous les peupliers [212]. Mais ce qui me convenait le mieux [213], c’était (de pêcher) des mulets et (de
contempler) ensuite ces beaux yeux.
Abou Bekr Ibn Martin prit ensuite la parole et dit :
Il est donc vrai que tu veux t’embarquer
sur ce fleuve charmant, afin d’avoir un entretien avec la personne qui te hait
et qui te tyrannise, et (que tu veux *407 aussi prendre)
des mulets et (t’amuser à) la pêche ? Ce ne sont pas [214] des poissons qu’elle pêche, mais des cœurs
d’hommes ! En voilà dans ses filets !
Abou Bekr Ibn Gozman parla alors et dit :
Quand il (ce jeune homme) relève ses
manches pour jeter ses filets, on voit les mulets se précipiter de ce côté‑là.
Ils ne s’y élancent pas avec l’intention d’y tomber, mais de baiser ses
charmantes petites mains [215].
Vers la même époque, il se trouvait dans l’Andalousie orientale un
poète nominé Makhlef el Asoued, qui composa de très jolies chansons. Une de
ses pièces commence ainsi :
J’ai été pris, moi qui craignais toujours
de me laisser prendre ; et l’amour m’a réduit à un état affligeant.
Dans ce poème il dit [216] :
Jusqu’à ce que tu voies sur cette
belle [217] et noble joue la rougeur portée à sa
dernière limite [218], ô toi qui cherches dans ses yeux la pierre
philosophale, (sache que) si elle les dirige [219] vers de l’argent, elle le convertit en or.
p.439 Après eux parut un groupe de
poètes dont le chef, qui se nommait Medeghlîs [220],
eut d’admirables inspirations. C’est ainsi qu’il a dit dans une chanson devenue
célèbre :
Quand une pluie fine tombe et que les
rayons du soleil frappent avec force, *408 tu verras celle‑là
se changer en argent et ceux‑ci en or. Les arbrisseaux boivent et
s’enivrent ; les branches s’agitent et frissonnent (de plaisir) ;
elles veulent se rapprocher de nous, puis elles cèdent à la honte et se
retirent [221].
Parmi ses meilleures chansons on remarque celle‑ci :
Le jour a paru et les étoiles en sont
consternées. Lève‑toi avec nous et secouons la paresse. Buvons d’un flacon qui
renferme un mélange plus doux, à mon avis, que du miel. O toi qui me blâmes
de [222] porter un collier [223], puisse Dieu te revêtir d’un collier à
cause de ce que tu as dit ! Tu dis [224] qu’un péché en produit un autre, au grand
détriment de l’intelligence. Passe [225] dans le pays du Hidjaz ! cela te
conviendra mieux ; que me veux‑tu avec ces vains discours ? Pars en
pèlerinage et visite (la maison sainte), mais permets que je m’adonne
librement [226] au (plaisir de) boire. Quand on n’a pas la
force [227] ni la puissance d’agir ; les (bonnes)
intentions valent mieux que les actes.
Après eux parut à Séville le poète Ibn Djahder. On s’accorde à *409 reconnaître qu’il l’emporta sur tous les
autres compositeurs de chansons par une pièce dans laquelle il célébra la
conquête de Majorque [228]
et qui commence ainsi :
Maudit soit celui qui tire l’épée pour
combattre (le dogme de) l’unité (de Dieu) ! Je ne veux avoir aucun rapport
avec un homme qui combat la vérité.
p.440 « Je l’ai rencontré, dit Ibn
Saîd, ainsi que son élève El-Yâbâ [229],
auteur de la chanson si bien connue qui commence ainsi :
Oh ! que je voudrais [230] voir ma bien‑aimée afin de lui
charmer [231] les oreilles en lui rapportant un petit
message : Pourquoi a‑t‑elle emprunté le cou de la gazelle et dérobé au
perdreau ( ?) sa (petite) bouche ? » »
Après eux vint Abou ’l-Hacen Sehl Ibn Malek, grand maître dans
toutes les branches de la littérature. Ensuite, de notre temps, parut mon ami
le vizir Abou Abd Allah Ibn el‑Khatîb, le premier poète et le premier prosateur
du peuple musulman, sans contredit. Une des meilleures pièces qu’il composa
dans ce genre (commence ainsi) :
Mêlez le vin dans les coupes ; versez‑en
pour moi et recommencez encore [232]. L’argent n’a été créé que pour être
dépensé.
Citons encore un morceau dans lequel il adopta le langage des soufis
et le style d’Es‑Chochteri [233] :
Depuis le lever (du soleil) jusqu’à son
coucher [234], ç’a été un mélange de chants *410 à l’honneur de l’objet aimé. Celui qui n’avait pas existé est parti
et celui qui n’a jamais cessé (d’être) reste [235].
Un autre morceau, composé par lui dans le même style, est
celui-ci :
Me trouver éloigné de toi, mon fils, est la
plus grande des afflictions ; et quand tu es près de moi, je laisse aller
ma barque à la dérive.
p.441 Il y avait en Espagne, du temps
d’Ibn el‑Khatîb, un natif de Guadix nommé Mohammed Ibn Abd el‑Adhîm, qui
s’était distingué dans ce même genre de poésie. Ayant pris pour modèle la
chanson (zedjel) de Medeghiîs qui commence ainsi : Le jour a paru, et les étoiles en sont consternées, il
composa le morceau suivant :
Amis de la dissipation ! la saison de
la folie est arrivée, maintenant que le soleil est entré dans le bélier (et que
l’année commence). Renouvelez, chaque jour, vos joyeux ébats ; ne mettez
point d’intervalle entre vos plaisirs. Livrons-nous aux jouissances près du
Xenîl [236], sur ce gazon verdoyant. Ne parlons plus
ni de Baghdad ni du Nil ; les lieux où nous sommes me semblent bien plus
charmants. On y voit une plaine [237] de plus de quarante milles d’étendue. *411 Que le vent y passe en allant et venant, jamais tu n’y rencontreras
la moindre trace de poussière, pas même autant que (la pincée) d’antimoine dont
on se noircit les paupières. Comment ne serait‑elle pas ainsi, puisqu’il n’y a
pas un endroit, (gros comme) une feuille de papier, où nous n’envoyions
butiner nos abeilles [238] ?
Le genre de poésie cultivé de nos jours chez les habitants de
l’Andalousie est la chanson (zedjel) : à tout ce qu’ils composent en
vers ils donnent la forme d’une chanson, et dans ces pièces ils emploient les
quinze mètres reçus ; mais le langage dont ils se servent est leur
dialecte vulgaire. C’est là ce qu’ils appellent poésie zedjélienne. En voici un exemple, composé par un de leurs
poètes :
Je mettrais des années et des siècles à
aimer tes beaux yeux ; mais tu es sans miséricorde [239], et ton cœur ne se laisse pas attendrir.
Je voudrais te faire voir ce que mon cœur est devenu à cause de toi : il
est comme un soc de charrue au milieu des forgerons. Les larmes coulent [240], le feu est ardent et les marteaux (frappent)
de droite et de gauche. Dieu a créé les chrétiens pour (subir nos) p.442 incursions destructives [241], mais toi, tu fais des incursions dans les
cœurs de tes amants.
Au commencement du siècle actuel, un des meilleurs compositeurs en ce
genre fut le littérateur Abou Abd Allah el‑Louchi [242].
Une cacîda, dans laquelle il célébra les louanges du sultan Ibn el‑Ahmer,
est de cette espèce. La voici :
*412 Le jour a paru [243], lève‑toi, mon compagnon, et buvons ;
rions ensuite, après nous être égayés. L’aurore, semblable à un métal fondu,
répand une lueur rouge en venant à la rencontre [244] de la nuit ; lève‑toi et verse (à
boire). Voilà un (vin) de bon aloi, blanc et sans mélange, c’est de
l’argent ; le crépuscule est de l’or. C’est une monnaie qui a grand cours
chez les mortels ; c’est à lui que les yeux (des belles) empruntent leur
éclat. Le jour, mon ami, est fait pour qu’on puisse gagner sa vie ; mais,
par Allah [245] ! la vie des riches se passe bien
heureusement. La nuit est faite pour les caresses et les embrassements, alors
qu’on s’agite sur la couche de l’amour. La fortune, autrefois avare, est
devenue libérale [246] : autant dans le passé (le pauvre) a
goûté, toute l’amertume (de la vie) [247], (autant il est heureux maintenant) en
buvant du boneïn [248] et en mangeant de bonnes choses. Un homme
qui épiait (mes démarches me) dit : « Quelle merveille ! *413 pourquoi te vois‑je si maigre [249], toi qui es toujours à goûter de l’amour
et du vin ? » Mes censeurs [250] furent émerveillés de cette
nouvelle ; je leur répondis : p.443 « Vous
autres, à qui cela paraît étrange, (sachez que) je ne puis aimer qu’une belle
d’un esprit délicat. Faut‑il que je le déclare en invoquant le nom de
Dieu [251], ou faut‑il que je l’écrive ? Il n’y
a qu’un poète à l’esprit cultivé qui puisse réussir auprès des belles : il
subjugue les vierges et triomphe des épousées. — La coupe (de vin) est une
chose défendue ; oui, elle est défendue pour celui qui ne sait pas en
boire. Les hommes intelligents, les sages et même les libertins obtiendront la
rémission de leurs péchés, dans le cas où ils en auront commis. Voyez celle
dont la beauté m’a séduit et que je ne puis attirer à moi, même par les paroles
les plus flatteuses. Elle est un faon [252] gras à éteindre les braises (sur
lesquelles on le ferait cuire), pendant que mon cœur brûle (d’un feu comme) la
braise de ghada [253]. (C’est) une gazelle dont les regards
percent jusqu’au cœur les lions qui, même auparavant, avaient perdu le
jugement [254]. En souriant, elle leur rend la vie, *414 ils rient et se réjouissent [255], après s’être lamentés. (Elle a) une
bouche petite [256] comme un anneau et des dents
irréprochables ; le prédicateur qui exhorte le peuple [257] demanderait la permission de la baiser.
(Ce sont) des perles entourées de corail ; quelle rangée, mon ami !
l’ouvrier les mit en ordre sans les percer. (Voyez encore) ces sourcils noirs
dont la puissance est irrésistible [258] ! Ceux qui leur trouvent de la
ressemblance avec du musc méritent qu’on leur donne tort. Ses cheveux pendent
en boucles (aussi noires) que l’aile d’un corbeau et font l’étonnement des
nuits (sombres) que je passe loin d’elle. (Ils descendent) sur un corps blanc,
de la couleur du lait ; jamais un berger n’a tiré de ses brebis (un lait
aussi blanc). Puis deux petites collines, — je n’avais jamais connu auparavant [259] un marbre [260] semblable ; — voyez combien elles
sont dures ! Au‑dessous de ses seins est une taille si mince [261], qu’en voulant la saisir vous craindriez
(de p.444 la briser) ; (une taille) plus mince
encore que mes sentiments religieux, comme vous le dites ; j’en conviens,
votre reproche est juste, et ne le démens pas [262]. Et comment pourrais‑je conserver ma
religion auprès d’elle ? Comment garder ma raison ? Ceux qui
recherchent ses faveurs perdent l’une et l’autre. *415 Elle a des hanches aussi lourdes qu’un espion (est onéreux) pour un
amant qui regarde et qui attend (l’arrivée de sa maîtresse) [263]. Ses belles qualités sont (aussi
nombreuses que) celles de notre prince, ou que les grains de sable ; qui
donc pourrait les énumérer ? (Ce prince est) le soutien des villes,
l’orateur des Arabes ; l’élégance de son langage suffirait pour nous
rendre (éloquents comme les anciens) Arabes. Il se distingue par un vaste
fonds de science et par ses actions ; son talent pour la poésie est
admirable ; et quelle superbe écriture ! Comme il est habile à percer
de sa lance les poitrines (de ses ennemis) ! Avec quelle force il frappe
de son sabre le cou (de ses adversaires) ! Ses qualités, qui saurait les
compter, dis‑le‑moi ? — qui saurait les énumérer [264] ? (Il en possède) quatre qui excitent
la jalousie du ciel : l’éclat du soleil, la sérénité de la lune, la bienfaisance
de la pluie et la dignité des étoiles. Il a pour monture le coursier de la
libéralité : il lâche la bride à la fermeté et à la résolution quand il
les prend pour montures. Chaque jour il revêt d’une robe d’honneur ceux qui
célèbrent ses hauts faits, (et ces robes) leur communiquent un doux
parfum [265]. On voit sur tous ceux qui s’approchent de
lui les marques de sa bonté ; ceux qui viennent et ceux qui *416 partent [266] ne sont jamais trompés dans leur attente.
Il a manifesté (et fait triompher) la vérité qui s’était [267] retirée derrière un voile ; la
fausseté est impuissante depuis qu’il l’a repoussée [268]. Il a redressé la colonne délabrée de la piété
que le temps avait renversée. Autant tu comptes sur ses bienfaits, autant tu as
peur en sa présence. Bien que sa figure exprime la bonté, combien elle inspire p.445 de respect ! Quand la guerre fronce les sourcils, il l’aborde
en souriant ; et, vainqueur partout, personne au monde ne peut le vaincre.
Quand il tire son épée au milieu des réprouvés, il n’a pas besoin de
répéter [269] le coup lorsqu’il en a frappé un. Il porte
le même nom que l’Élu (Mohammed), et Dieu l’a préféré et choisi pour occuper le
sultanat. Tu le vois (toujours agir) en khalife chargé des affaires des
musulmans, soit qu’il se trouve à la tête de ses troupes, soit qu’il s’entoure
d’un brillant cortège. Quand il donne un ordre, toutes les têtes se baissent
devant lui ; oui, assurément, et tous désirent lui baiser la main. Ses
fils [270], les Beni Nasr [271], sont les ornements [272] du siècle ; ils s’élèvent vers le
faîte de la *417 gloire pour ne plus en descendre. Dans (la
carrière des) hauts faits et des nobles actions ils vont bien loin, mais ils se
rapprochent (de Dieu) par leur humilité et leur modestie. Que Dieu les conserve
tarit que la sphère tournera, tant que le soleil éclairera (le monde) et tant
que les étoiles brilleront (dans le ciel) ! Toutes les fois que cette cacîda
sera chantée [273] dans les assemblées, cache ta honte [274], ô soleil ! elle (est un astre qui)
ne se couchera jamais.
Les habitants des villes, dans le Maghreb, commencèrent ensuite à
employer un nouveau genre de poème composé d’hémistiches accouplés à l’instar
de l’ode. Le dialecte dont ils s’y servaient fut aussi celui qui est
particulier aux villes. On désignait ces pièces par le terme oroud el‑beled (rimes de ville). Celui qui introduisit ce genre chez eux fut un
natif d’Espagne et se nommait Ibn Omaïr. S’étant fixé à Fez, il composa un
poème sur le plan suivi dans les odes, mais en s’écartant assez rarement des
règles de la syntaxe arabe [275].
Cette pièce commence ainsi :
Vers le point du jour, pendant que j’étais
sur le bord de la rivière, les gémissements de la colombe, perchée sur un
arbre du jardin, me firent verser des larmes [276]. La main de l’Aurore venait d’effacer
l’encre des ténèbres, et la rosée [277] p.446 découlait des
bouches souriantes des fleurs. J’étais allé de bon matin visiter la
prairie ; les gouttes d’humidité s’y voyaient répandues [278] comme des perles [279] échappées du collier qui pare le cou d’une
jeune fille. L’eau fournie par les *418 norias [280] coulait abondamment, serpentait partout à
l’instar des dragons, entourant d’un cercle chaque arbre à fruit et cernant comme
un anneau le pied de chaque arbrisseau couronné de rameaux. Tout cela formait
un bracelet autour du jardin. La rosée déchirait de ses mains les voiles [281] dont s’entouraient les boutons de fleurs,
et les zéphyrs en emportaient le parfum. Le teint noir des nuages [282] formait des taches sur l’ivoire du
jour ; le zéphyr traînait sa robe (sur les fleurs) en répandant une douce
odeur. Je vis (alors) sur une branche [283], au milieu des feuilles, une tourterelle
dont les gouttes de rosée avaient humecté les plumes, et qui gémissait comme un
amant éperdu d’amour et loin de son pays. Elle s’était enveloppée de son
plumage [284] neuf comme d’un manteau, mais elle avait
le bec [285] et les pattes teintes en rouge. Elle
portait autour du cou un collier de pierres précieuses, et se tenait perchée
au milieu des rameaux, (triste) comme un amant affligé, ayant pour oreiller une
de ses ailes et pour couverture l’autre [286]. Elle se plaignait de l’ardeur qui
consumait son cœur, et, dans sa (douleur), elle serrait son bec contre sa
poitrine et poussait des cris. Je lui dis : Colombe, tu empêches mes yeux
de goûter le sommeil ; dis‑moi, ne *419 cesseras‑tu pas
de te lamenter et de verser des larmes ? Elle répondit : J’ai pleuré
au point d’épuiser mes larmes, et je n’en ai plus à verser. Pendant toute ma
vie je me lamenterai [287] de la perte d’un de mes petits qui s’est
envolé de chez moi pour ne plus revenir [288] ; cela m’a habituée au chagrin et aux
larmes depuis [289] le temps de Noé. Voilà, disais‑je, comment
on remplit son devoir ; voilà la fidélité. (Elle répondit) : Voyez
mes paupières devenues (rouges) comme des blessures ! Mais, parmi vous
autres hommes, celui qui est dans l’affliction dit au bout d’une année :
Cela m’ennuie de pleurer et de me lamenter. Je lui dis : Colombe ; si
tu étais plongée dans l’océan des souffrances, tu pleurerais [290] sur moi, en versant des torrents de
larmes, et, s’il y avait dans ton cœur ce (feu brûlant) qui p.447 est dans le mien, les branches, qui te portent seraient réduites en
cendres [291]. Aujourd’hui, depuis combien d’années
n’ai-je pas souffert les peines (de l’absence ! Elles m’ont tellement
amaigri), que les yeux des autres sont absolument incapables de me voir. (Le
chagrin) a revêtu mon corps de maigreur et de maladie, et cette maigreur me
dérobe aux regards des observateurs. Si la mort [292] voulait *420 venir à moi, je
mourrais (volontiers) à l’instant même ; celui qui est mort, sache‑le
bien, jouit enfin du repos. Elle répondit [293] : Mes larmes, en se déteignant [294] sur la blancheur (de mes plumes), ont posé
sur mon cou le collier de la fidélité, (et il y restera) jusqu’au jour de la
résurrection. Quant à l’extrémité de mon bec, l’histoire de son (accident) est
répandue partout : elle est comme un morceau de braise (qui reste encore
allumé) après que le corps a été réduit en cendres [295]. Les colombes de toute espèce me
plaignent [296] et pleurent sur moi ; celui qui est
accablé par le dédain et par l’aversion (de la part de sa bien‑aimée) manifeste
ouvertement (les peines qu’il souffre). Adieu au monde et, à son éclat, puisque
je n’y ai trouvé ni tranquillité ni repos.
Les habitants de Fez admirèrent beaucoup ce poème et l’accueillirent
avec empressement. Ils en composèrent d’autres sur le même modèle, mais en y
négligeant les règles de la syntaxe désinentielle, science qui n’était pas leur
affaire. Ce genre de composition se répandit chez eux, et plusieurs de leurs
poètes y montrèrent un grand talent. On l’a distingué en plusieurs espèces,
telles que le mozaouwedj (l’accouplé),
le kazi [297],
la melaba, et le ghazel (le madrigal). Les noms diffèrent selon la
manière dont les vers y sont accouplés, selon les mesures employées et selon le
but que l’auteur avait en vue. Voici un
mozaouwedj composé par Ibn Chodjaâ, qui était un de leurs
grands poètes et natif de Taza [298] :
p.448 *421
L’argent fait l’ornement (de la vie) de ce
monde et l’orgueil des âmes ; il égaye des visages qui n’étaient pas
portés à la gaieté. L’homme qui possède des deniers en quantité obtient
(partout) la parole et la place d’honneur [299]. Celui qui a beaucoup d’argent est un
grand homme, bien qu’il ait peu de mérite, et l’individu le plus honorable
d’une tribu est un mince personnage s’il est devenu pauvre. Voilà ce qui me
serre le cœur ; voilà ce qui y porte le trouble ; cela suffirait pour
le briser si je ne m’étais résigné aux décrets de la providence. Quand un
grand, celui qui est le chef de son peuple, est obligé de chercher asile [300] auprès [301] d’un homme sans naissance et sans
considération, un tel renversement doit nécessairement nous attrister. Dans la
contrariété que j’en éprouve, je me voile la tête [302] avec ma robe. Ce sont alors les queues qui
se mettent devant les têtes ; c’est la rivière qui demande au
ruisseau [303] un peu d’eau. Est‑ce la faiblesse des
hommes qui en est la cause, ou bien la malice de la fortune ? On a *422 bien des reproches à faire, mais on ne sait à qui les adresser.
Voilà qu’aujourd’hui on donne le titre de père
d’un tel (Bou Folan) à celui qui (hier) se nommait (simplement) un tel (Folan) [304] ;
et si tu voyais comment (il se pavane) avant de répondre à ce qu’on lui
demande ! Nous avons vécu, Dieu merci, assez longtemps pour voir de nos
propres yeux des âmes de sultans (renfermées) dans des corps de chiens. Des
hommes d’une grandeur d’âme tout à fait extraordinaire restent presque sans appui ;
ils se trouvent d’un côté, et l’honneur qu’ils méritent se trouve d’un autre.
Le peuple voit que les (riches) sont des ânes [305], et cependant il les regarde comme les
notables de la ville et les fermes appuis (de l’État) [306].
Voici encore un mozaouwedja du genre qui est reçu chez eux ; il a
pour auteur leur compatriote Ibn Chodjaâ :
Il se fatigue (inutilement) celui dont le
cœur s’attache aux belles de nos jours. p.449 Prends garde à
toi, ami ! (ne souffre pas) que la beauté te prenne pour son jouet. Aucune
belle n’a fait une promesse sans l’avoir rompue ; il y en a bien peu à qui tu puisses te confier et qui aient confiance en toi. Elles
traitent leurs amants avec dédain, résistent (à leurs prières) et cherchent, de
propos délibéré, à briser les cœurs des hommes. Qu’elles contractent une
liaison, elles la briseront sur‑le‑champ ; qu’elles fassent une promesse,
elles la rompront dans tous les cas. *423 Il y avait [307] une belle que j’aimais et dont mon cœur
était épris ; j’aurais donné la peau de mes joues pour lui en faire des
sandales ; j’avais disposé dans le centre de mon cœur un lieu pour l’a
recevoir, et je disais : O mon cœur ! traite avec honneur celle qui
vient loger chez toi. Elle traita comme une bagatelle les humiliations
qu’elle [308] t’imposait, et te fit subir tout ce qu’il
y a de redoutable dans l’amour. Je lui
avais donné plein pouvoir sur moi ; je consentais à la reconnaître pour
la maîtresse (de mon cœur). Oh ! si vous aviez vu dans quel état j’étais
quand je la voyais [309] ! Je savais à l’instant à quoi
tendait chacune de ses pensées [310], et je devinais ses souhaits avant qu’elle
les eût exprimés ; j’usais de toute mon adresse pour satisfaire à ce
qu’elle désirait, quand même c’eût été de faire de l’huile au printemps ou
d’éplucher (du blé) pendant qu’il fait nuit. J’irai la voir, quand même elle
serait à Ispahan ! N’importe tes remontrances, il faut que je lui
dise : « (Ton amant) vient te visiter. »
(Cela continue sur le même ton) jusqu’à la fin de la pièce.
Un autre de ces poètes vivait à Tlemcen et se
nommait Ali Ibn el‑Mouedden : Dans ces derniers temps il y avait à
Zerhoun, près de Miknéca *424 (Mequinez), un nommé El‑Kefîf qui s’était distingué par le talent vraiment original
qu’il déploya dans toutes les branches de ce genre de composition. J’avais
appris par cœur quelques‑unes de ses pièces, et, parmi celles qui sont restées
dans ma mémoire, il y en a une qui a pour sujet la marche des Mérinides vers
l’Ifrîkiya, sous la conduite du sultan Abou ’l-Hacen. Le poète, après avoir
blâmé cette p.450 expédition, parle de
leur défaite à Cairouan [311]
et les console de cet échec en leur citant les malheurs qui sont arrivés à
d’autres peuples. Son poème est une espèce de melaba, et offre, au commencement, un bel exemple de la figure de rhétorique
appelée beraât el‑istihlal (bonté de l’exposition), et qui consiste à faire sentir la
tendance d’une pièce tout d’abord et dès le début même. En voici le
commencement :
Gloire à celui qui, dans tous les temps,
dirige à son gré les intentions des rois ! Si nous lui montrons notre
obéissance, il nous accorde un secours efficace, et si nous transgressons ses
ordres [312], il nous inflige tous les genres
d’humiliation.
Le poète continue dans le même style jusqu’à ce qu’il entre en
matière ; alors il demande, en ces termes, ce qu’était devenue l’armée du
Maghreb :
Fais partie d’un troupeau, quelque petit
qu’il soit, plutôt que d’en être le berger ; le berger doit répondre de
son troupeau. Invoquons, dans l’exorde la bénédiction de Dieu sur celui qui appela
les hommes à l’islamisme, sur l’agréé de Dieu, sur le Prophète exalté et
parfait [313], puis sur les khalifes bien dirigés, puis
sur les successeurs (des Compagnons) [314] ; ensuite [315], parle de qui tu veux et dis : *425 O pèlerins qui avez pénétré dans le Sahra et qui savez décrire les
pays et leurs habitants ! l’armée de Fez, si brillante [316], si belle, où est‑elle passée d’après la
ferme volonté du sultan ? Pèlerins, je vous le demande, au nom du
Prophète [317] dont vous avez visité le tombeau, et à
cause de qui vous avez traversé les collines du, désert, qu’est devenue l’armée
maghrébine qui a disparu dans la noire Ifrîkiya ? (qu’est devenu) celui
qui vous avait donné des provisions en abondance et qui, par ses dons) avait
répandu le bien‑être jusque dans le pays du Hidjaz [318] ?
*428
Le poète se met alors à décrire la ligne de marche suivie par les p.451 troupes, et finit par raconter la dernière
expédition du sultan, celle *429 qu’il
avait entreprise contre les Arabes nomades de l’Ifrîkiya (et qui lui fut si
désastreuse). Ce poème renferme des pensées et des tournures très originales.
Les Tunisiens aussi avaient inventé un genre de melaba, dans laquelle ils se servaient de leur dialecte
vulgaire [319] ;
mais la plupart de leurs pièces sont si mauvaises, que je ne m’en rappelle plus
une seule.
Il y avait à Baghdad, chez les gens du peuple, un genre de poème
qu’ils nomment mewalîa [320] et qui renfermait plusieurs espèces
désignées par les termes haufi, kan‑wa‑kan,
dou‑beïteïn [321], etc. La diversité de ces dénominations
provenait de la diversité des mètres qu’ils avaient l’habitude
d’employer : aussi chaque espèce a‑t‑elle son nom particulier. Celle qui
est la plus usitée est le mozaouwedja (accouplé),
pièce composée de quatre ghosn (ou
vers).
Les gens de Misr et du Caire ont suivi l’exemple de ceux de Baghdad.
On remarque beaucoup de traits originaux dans les pièces de leur composition,
les auteurs ayant mis à contribution les tournures de l’idiome vulgaire pour
exprimer leurs idées. Aussi ces productions sont‑elles très remarquables.
[J’ai trouvé [322]
dans le Diwan d’Es‑Safi el‑Hilli [323]
un passage que je reproduis ici dans les paroles de l’auteur ; « La mewalîa est du mètre nommé besît, et se compose de quatre ghosn ayant des rimes (identiques [324]).
On la nomme aussi saut (voix, son) et beïteïn (quatrain) [325].
Ce p.452 furent les habitants d’Ouacet
qui, les premiers, imaginèrent ce genre de poème. Le kan‑wa‑kan se compose de (quatre) chatr (lignes, hémistiches) ayant tous la même rime, mais étant de
mesures différentes ; le premier chatr
de chaque vers est plus long que le second. La lettre qui forme la
rime doit être précédée d’une des lettres faibles ﺍ , ﻮ , ﻯ. Ce
furent les gens de Baghdad qui inventèrent la mewalîa. On nous a récité une pièce de ce genre (qui commence
ainsi) : Dans un signe *430 fait avec les sourcils il y a un discours
qui explique (la pensée) et la fait entendre à Omet
el‑Akhras [326] ; cette pièce est dans le dialecte de Khoraçan.] » Fin de l’extrait. Voici ce que je me
rappelle de plus remarquable parmi
les morceaux de cette espèce :
Regarde ma blessure qui saigne
encore ; (sache, ) mon cher frère, que l’assassin s’amuse à la campagne.
On m’a dit : « Tu pourras te venger ». J’ai répondu :
« Cela serait mal ; la personne qui m’a blessé [327] me guérira ; cela sera mieux ».
Un autre poète a dit :
Je frappai à la porte du pavillon, et une
femme dit : « Qui frappe ? » Je répondis :
« Un affligé, point voleur ni brigand. » Elle sourit, et l’éclat de
ses dents brilla devant mes yeux ; je m’en retournai, tout ébloui et noyé
dans l’océan de mes larmes.
Un autre a dit :
Je me rappelle le temps où elle redoutait
notre séparation et disait, lorsque l’amour m’arrachait des plaintes :
« (Sois tranquille !) je donnerais mes yeux pour racheter ta
vie. » Un beau jeune homme lui donna dans l’œil [328] ; je lui rappelai sa promesse et elle
répondit : « Je suis ta débitrice [329]. »
Une (drogue) dont je m’enivre en cachette,
pendant que je ressens encore les effets qu’elle a produits. Avec elle nous
pouvons nous passer de vin, de cabaretier et d’échanson. Elle est méchante, et
sa méchanceté contribue à entretenir le feu qui me dévore. Je la cachai dans
mon estomac, mais elle se montra dans mes yeux.
Un autre a dit :
O toi dont la rencontre fait dire aux
amants [331], bravo !
jusqu’à quand tourmenteras‑tu ce cœur par ton dédain ? Aïe ! hélas ! tu m’as frappé
au cœur avec ton va‑t‑en ! et la patience, plût au ciel (que j’en eusse) ! Le monde est à mes yeux une chose
qui fait dire fi ! quant à ta
personne, chut [332] !
Par un autre :
Je disais à cette belle, lorsque la canitie
avait totalement envahi ma tête : « Ma petite mère ! accorde‑moi
un baiser à cause de mon amour. » Elle répondit, après avoir laissé dans
mon cœur une douleur brûlante : « Que veut dire du coton sur la
bouche d’un homme vivant [333] ? »
La pièce suivante est d’un autre poète :
Elle me regarda en souriant, et les averses
de mes larmes tombèrent avant [334] que son éclair (c’est‑à‑dire l’éclat de
ses dents) eût paru. Elle ôta son voile et *432 je crus voir la
lune à son lever. Elle répandit (sur ses épaules) les ténèbres de ses cheveux,
et mon cœur s’égara dans ce labyrinthe. Elle me dirigea enfin au moyen d’un fil
blanc formé par la raie de sa chevelure.
Voici
un morceau par un autre poète :
Chamelier ! pousse nos montures en
avant, et arrêtons‑nous, avant l’aurore, p.454 auprès de la
demeure où habitent nos bien‑aimées. Crie [335] alors dans (le campement de) la
tribu : « Celui qui veut une récompense, qu’il vienne prier sur le
mort que le dédain a tué. »
Un autre a dit :
Ces yeux avec lesquels je t’ai regardée ont
passé la nuit à contempler les étoiles et à s’alimenter de l’insomnie. Les
flèches de la séparation n’ont pas manqué de m’atteindre ; ma tranquillité
d’esprit est morte ; que Dieu t’en accorde une abondante récompense !
Par un autre :
Belles filles qui êtes si tyranniques [336] !
j’aimais dans votre village un faon qui tourmentait les lions féroces en
leur donnant des soucis ; un tendron qui, en se balançant (avec grâce),
captivait les cœurs des jeunes vierges, et qui, en se découvrant la figure,
ôtait à la lune le droit de lui être comparée.
Voici une des pièces qu’on nomme dou‑beïteïn :
*433 Celle que j’aime jura par le Créateur que, chaque nuit, elle
enverrait son image me visiter pendant mon sommeil. O feu du désir que
j’éprouve pour elle ! brûle vivement pendant la nuit ; ta lumière
servira peut‑être pour la guider.
Il faut maintenant savoir que, pour acquérir le genre de goût au moyen
duquel on apprécie la valeur des expressions employées, dans l’un ou l’autre de
ces dialectes, pour énoncer des idées, il faut s’être familiarisé avec ce
dialecte, s’en être servi très souvent et avoir beaucoup conversé avec le
peuple qui le parle. C’est ainsi qu’on acquiert la faculté de manier un idiome
quelconque, ainsi que nous l’avons dit en traitant de la langue arabe. Aussi
les Espagnols ne comprennent‑ils pas la force des termes qui s’emploient dans
la poésie des Maghrébins ; ceux‑ci ne saisissent pas bien la valeur des
expressions qui se rencontrent dans la poésie des Orientaux et dans celle des
Espagnols ; les Orientaux, de leur côté, n’entendent pas les expressions p.455 usitées dans la poésie de l’Espagne et dans
celle du Maghreb. En effet, l’idiome parlé dans chaque pays diffère, par sa
phraséologie, de ceux dont on se sert ailleurs ; les habitants de chaque
ville comprennent la force des expressions usitées dans le dialecte de cette
ville et se trouvent ainsi en état de goûter les poèmes de leurs compatriotes.
Et dans la création des cieux et de la
terre, ainsi que dans la diversité de vos langues et de vos couleurs, il y a
des signes (instructifs) pour toutes les créatures. (Coran, sour. XXX, vers. 21.)
Nous étions sur le point de nous écarter de notre sujet, quand nous
nous sommes décidé à mettre fin au discours que nous avons tenu dans cette
première partie de notre ouvrage [337],
discours qui a eu pour objet la nature de la civilisation et les accidents qui
s’y présentent. J’ai traité d’une manière qui me paraît suffisante les divers
problèmes qui se rattachent à cette matière. Il viendra peut‑être après moi une
personne qui, ayant reçu de Dieu un jugement sain et une science *434 solide, entreprendra l’examen d’autres
questions bien plus nombreuses que celles dont nous avons parlé. Car celui qui
a établi pour la première fois une branche de science n’est pas tenu de
traiter tous les problèmes qui s’y rattachent ; il n’a d’autre obligation
que de faire connaître l’objet de cette science, les principes d’après lesquels
on la divise en plusieurs parties et les observations auxquelles elle a donné
lieu. Ceux qui viendront après lui ajouteront graduellement d’autres problèmes
à cette science, jusqu’à ce qu’elle ait acquis toute sa perfection. Dieu sait, et vous ne savez pas.
[A la fin de l’exemplaire dont ceci est la copie on lit ce qui
suit :] [338]
L’auteur de cet ouvrage dit : « J’ai terminé la composition de cette
première partie, renfermant les Prolégomènes,
en l’espace de cinq mois, dont le dernier fut celui qui marque le milieu de
l’an [339]
779 (octobre 1377 de J. C.). Je l’ai ensuite mis en ordre et corrigé ; j’y
ai ajouté p.456 l’histoire de tous les peuples, ainsi
que j’en avais pris l’engagement dans ma préface. Et la science ne saurait
provenir que [340]
de Dieu, le puissant et le sage !
[1]
C’est dans la Rhétorique qu’Aristote fait l’éloge d’Homère, mais on sait que
les Arabes rattachèrent ce traité à celui de la Logique.
[2]
Il est évident que notre auteur parle ici des anciens Himyarites ; mais, à
son époque, rien ne restait de leur langue excepté un très petit nombre de
mots. Ce peuple a pu avoir des poètes, mais les Arabes ne connurent presque
rien, ni de leur histoire, ni de leurs poèmes.
[3]
C’est‑à‑dire les syllabes longues et brèves.
[4]
L’auteur, en suivant une théorie préconçue, partage le peuple arabe en quatre
grandes races. La première, qu’il désigne par le nom d’Arabes arabisants (c’est‑à‑dire les Arabes de race pure), se composait d’Amalékites, d’Adites, de
Tamoudites et d’autres tribus descendues d’Arem et de Lud, fils de Cham. Cette
race s’éteignit à une époque très reculée. La seconde race, appelée Arabes arabisés, descendait de Himyer,
fils de Saba. La troisième se composait des Arabes successeurs des Arabes, c’est‑à‑dire des descendants de
Codaa, de Cahtan et d’Ismaïl. Ce furent eux qui fondèrent l’empire musulman.
Les Arabes de la quatrième race, ayant laissé leur langue s’altérer par la
suppression d’une grande partie des inflexions grammaticales et par
l’introduction d’éléments étrangers ou barbarismes, sont désignés dans cet
ouvrage par le nom d’Arabes barbarisants.
Ce sont eux qui, de nos jours, habitent l’Arabie, la Syrie, l’Égypte
et l’Afrique septentrionale.
[5]
Le passage mis entre crochets ne se trouve que dans le manuscrit A et la
traduction turque. Le mot hauraniya signifie hauranien (composé
par les Arabes de la province de Hauran en Syrie) ; par le terme caïsiya,
on désignait les poèmes composés par les Arabes de la tribu de Caïs, et ceux‑ci
se tenaient ordinairement dans le Hauran.
[6]
Littéral. « formant quatre branches ».
[7]
Pour ﺔﻳﻮﺭ , lisez ﻪﻴﻮﺭ .
[8]
Dans les morabbâ, ou quatrains, on ajoutait à chaque hémistiche d’un
ancien poème trois hémistiches nouveaux, afin d’en développer la pensée ou de
la modifier. Le mokhammès, ou
quintain, ressemblait au morabbâ, mais
se composait de cinq hémistiches.
[9]
Les manuscrits portent ﻥﻮﺭﺿﺎﺗﻤﻠﺍﻮ avec
la conjonction.
[10]
J’avoue que je partage l’opinion des savants musulmans au sujet de ces poèmes.
On verra, par les échantillons que l’auteur va nous en donner et dont il a
ramassé une grande partie chez les Arabes bédouins de l’Afrique septentrionale,
que le style est très incorrect et souvent très obscur, que les règles de la
grammaire et de la prosodie n’y sont pas respectées, et que le langage dans
lequel ils sont écrits diffère beaucoup de l’ancien arabe et même de l’arabe
vulgaire, tel qu’on le parle de nos jours. Les morceaux africains appartiennent
au dialecte d’une tribu qui avait longtemps habité la province de Bahreïn en
Arabie, et qui s’était toujours fait remarquer par la rudesse de ses mœurs et
l’incorrection de son langage. Ces pièces ont cependant une certaine
importance, puisqu’elles montrent qu’au Ve siècle de l’hégire les formes de l’arabe
vulgaire étaient déjà usitées chez les Arabes nomades : nous y trouvons elli
mis pour elledi, elleti, elledîn, etc.
ândou pour andahou, liya pour
li, mecherta pour mechreta,
etc.
[12]
Pour ﺩﻭﺼﻗﻣﻠﺍ , lisez ﺩﻭﺻﻗﻣﻠﻠ .
[13]
A l’exemple du traducteur turc, je n’essaye pas de rendre les mots ﻪﻳﻔ ﺪﻭﺠﻮﻠﺍ ﻥﻣ
. Je crois, cependant, qu’ils signifient correspondance qui provient des
qualités qui existent dans cette langue.
[14]
Le refâ est la voyelle finale qui marque le cas nominatif dans les noms
et l’aoriste du mode indicatif dans les verbes.
[15]
Le nasb désigne le cas accusatif des noms et le mode subjonctif de
l’aoriste des verbes.
[16]
C’est‑à‑dire : la consonne finale du mot ne prend pas de ces voyelles qui servent
à indiquer des rapports grammaticaux.
[17]
On sait qu’au milieu du Ve siècle de l’hégire El‑Mostancer, le khalife
fatémide qui régnait au Caire, envoya plusieurs tribus arabes contre El‑Moezz
Ibn Badîs, son lieutenant en Ifrîkiya, lequel s’était mis en révolte contre
lui. Ces Arabes comptaient alors parmi leurs chefs Hacen Ibn Serhan, Bedr Ibn
Serhan, Fadl Ibn Nahed, Madi Ibn Mocreb, Dîab Ibn Ghanem, Tholeïdjen Ibn Abès,
Zeid el‑Addjadj Ibn Fadel, etc. Les poèmes que notre auteur va donner font mention
de quelques‑uns de ces chefs. Pour les détails de cette invasion, voyez l’Histoire
des Berbers, t. I, p. 28 et suiv.
Voici ce que notre auteur y dit (p. 41) au sujet du cherîf Ibn Hachem et de
ces poèmes : « On conserve chez les Arabes hilaliens des récits fort
curieux relativement à leur entrée en Ifrîkiya. Ainsi ils prétendent que le
chérif Ibn Hachera, prince du Hidjaz, et appelé, selon eux, Chokr Ibn
Abi ’l-Fotouh, contracta une alliance avec leur chef, Hacen Ibn Serhan,
dont il épousa la sœur, El‑Djazia, et que de ce mariage naquit un fils appelé Mohammed. »
« Des querelles et des
dissensions s’étant ensuite élevées entre le cherîf et les membres de la
tribu, ceux‑ci prirent la résolution de passer en Afrique ; mais,
d’abord, ils usèrent de ruse afin de pouvoir emmener la femme du cherîf.
D’après leurs conseils, elle demanda à son mari la permission d’aller visiter
ses parents. Il y donna son consentement et l’accompagna jusqu’au lieu où la
tribu était campée. On partit alors, emmenant le cherîf et son épouse, avec
l’intention apparente de le conduire à un endroit où l’on se livrerait, le
lendemain, au plaisir de la chasse, et de revenir au lieu du campement
aussitôt que les tentes y seraient dressées de nouveau. Tant qu’ils se
trouvaient sur le territoire du cherîf, ils lui cachaient leur
véritable projet ; mais, lorsqu’ils eurent atteint les terres situées hors
de la juridiction de ce chef, ils le renvoyèrent à la Mecque, le cœur rempli de
douleur en se voyant enlever la personne qu’il aimait tant. Sa femme continua
à ressentir pour lui un amour égal à celui qui le tourmentait, et elle mourut
enfin, victime de sa passion. Encore aujourd’hui, dans la tribu de Hilal, on
raconte au sujet de ces deux amants des histoires à faire oublier celles de
Caïs et de Kotheiyer. On rapporte aussi un grand nombre de vers attribués au
cherîf et à sa femme. Bien que ces morceaux ne manquent pas de régularité et de
cadence, ainsi que de tournures, soit naturelles, soit artistiques, on y
remarque des interpolations, des altérations et des passages controuvés. Les
règles de la syntaxe désinentielle y sont tout à fait négligées ; mais
nous avons dit dans nos Prolégomènes que l’absence des inflexions grammaticales
n’influe nullement sur la juste expression de la pensée. Il est vrai que les
gens instruits, habitants des villes, n’aiment pas à entendre réciter de tels
poèmes, parce que les désinences grammaticales y manquent ; un tel défaut,
selon leur idée, est radicalement subversif de la précision et de la clarté ;
mais je ne suis pas de leur avis. Ces poèmes, avons‑nous dit, renferment des
interpolations nombreuses, et, dans l’absence de preuves qui pourraient montrer
qu’ils nous ont été transmis fidèlement, on ne doit y mettre aucune confiance.
Il en serait bien autrement si nous avions la certitude de leur authenticité et
l’assurance que la tradition orale les eût conservés dans leur intégrité
primitive : alors on y trouverait des passages propres à confirmer
l’histoire des guerres de cette tribu avec les Zenata, à déterminer les noms de
ses chefs et à établir bien des circonstances qui la regardent. Quant à nous,
il nous est impossible d’admettre que le texte de ces poèmes se soit conservé
intact : nous pensons même que tout esprit cultivé y reconnaîtra facilement
des passages interpolés. Quoi qu’il en soit, les membres de la tribu de Hilal
s’accordent, depuis plusieurs générations, à regarder comme vraie l’histoire du
cherîf et d’El‑Djazia ; et quiconque serait assez hardi pour en contester
l’authenticité, ou même exprimer des doutes, s’exposerait à être traité de fou
et d’ignorant, tant cette tradition est générale chez eux. »
[18]
Ce morceau est d’un style très barbare ; aussi les copistes ne le comprenaient‑ils
pas, et ils ont, en le transcrivant, altéré le texte presque partout. L’édition
de Paris nous fournit un grand nombre de variantes, bien qu’elle ne reproduise
pas toutes celles qui se trouvent dans les manuscrits C et D. La traduction
turque offre un texte qui ne s’accorde pas toujours avec celui de l’édition de
Paris, et donne aussi en marge une série de nouvelles variantes. Le texte de
l’édition de Boulac a été retouché par un copiste qui, évidemment, n’entendait
rien aux vers qu’il avait sous les yeux. Malgré l’extrême difficulté de ce
morceau, dont presque chaque mot est douteux, je crois en avoir saisi le sens
dans la plupart des cas. J’en donne ici la transcription en caractères romains
afin de faire sentir la valeur et la position des voyelles qui ne sont pas
exprimées dans le texte, et j’y ai intercalé les variantes que j’ai cru devoir
adopter. Bien que cette pièce ne se laisse pas scander d’après les règles
ordinaires, on verra que chaque vers se compose de trois pieds de quatre
syllabes ; dans les deux premiers pieds, toutes les syllabes sont
ordinairement longues ; dans le dernier pied, l’antépénultième syllabe
est brève, et la première syllabe est quelquefois supprimée. Au reste, je
crois que la pièce n’est pas authentique :
Gal Bou ’l-Hidja [ﺎﺟﻳﻬﻠﺍ ﻮﺒﺍ ﻞﺎﻗ] ’s‑cherif ben Hachem âl
Elli tera kebdo chekat min
zefîrha ;
Ifezz lil‑eilam aïn marrat [ﺖﺭﻤ ] khatro [ﻩﺭﻂﺎﺧ]
Irîd gholam el‑bedo ilwi
asîrha.
Ou m’da chekat er‑rouh memma tera leha
Ghadat oudaya [ﻊﻴﺍﺪﻮ],
tellef Allah khebîrha !
Tehess
an gattaân, madi dhemîrha,
Bi mcherteto hindawi [ﻮﺍﺪﻨﻫ] safi
dekîrha ;
Ou adet
kema khowara fi yeddi ghacèl,
Ala methèl chouk et‑Talh
ânfo licîrha.
Yedjabedouha ‘tsnîn ou el‑frâ bînhom
Ala souko [ﻪﻜﻮﺴ]loghdou ’l-begaya
[ﺎﻳﺎﻗﺒﻠ] djerîrha.
Ou djat demouâi, darefat [ﺖﺎﻔﺮﺍﺬ], kéanha [ﺎﻬﻨﺎﻜ]
Bi-yedîn douwar es‑souani
yedîrha.
Tedarek minha’l‑djomm
[ﻢﺟﻟﺍ ] hadran ou zadha
Mozoun tedji mterakeba min
sebîrha.
Tesobb min el‑guiâni min djanb es‑Sefa
Aïouna oua lemhan [ﻥﺎﺣﻣﻠ] el‑berk fi ghazîrha.
Had el‑ghena metta
tesabît âzoua [ﺓﻮﺯﻋ].
Nahat [ﺖﺣﺎﻨ] minni Baghdad hatta fekîrha.
Ou nada ’l-monadi
bi ’r‑rahîl oua cheddedou [ﺍﻮﺪﺪﺷ]
Oua ârredj ârîha âla mstâîrha.
Seddan leha’l‑an
ya Dîab ben Ghanem !
Ala yeddîn Madi ben Mogreb sîrha.
Oua gal lehom
Hacen ben Serhan : Gharribou
Ou sogou ’n‑nedjwâ en kan ana houa ghafîrha.
Ou irkos oua indeh
[ﻩﺪﻨﻴ] bînha [bi]’l‑Thaïdj [ﺞﻴﺎﺛﻠﺎﺒ]
Oua bi-lehmîn [ﻦﻴﻬﻣﻠﻠﺎﺑ] la iohdjezou [ﺍﻮﺯﺟﺣﻴ] fi maghîrha
Ghaderni Zîan
es‑semîh ben Abès,
Oua ma kan yerda zîn Hemîr oua mîrha.
Ghaderni ouh zâma sedîki ou sahbi,
Ou ana liya ma m’dergeti ma
nedîrha.
Ou rdjâ igoul
lehom Belal ben Hachem :
Nedjîr el‑bla oua [ﻭ ﻼﺑﻠ ]’l-âtcha ma nedjîrha !
Haram
âliya bab Baghdad oua ardha,
Dakhel oua la âoued, rekbi [ﻰﺒﻜﺮ] nefîrha.
Teseddef rouhi
ân belad Ben Hachem
Ala ’s‑chims aou nzel el‑gada min hedjîrha !
Oua batet
nîran el‑adhari couadeh,
Bi-Loud [ﺬﻭﻠﺒ] ou bi-Khordjan [ﻦﺎﺠﺮﺧ] ich‑dou acîrha.
[19]
Littéral. « qui tord, ou comprime, ce qui en avait été comprimé ».
[20]
Le mot michreta (ﺔﻁﺭﺷﻤ), ou, selon la
prononciation vulgaire, mecherta ou em-cherta, signifie « un
bistouri » ; le ouaou final du mot ﻮﺗﻁﺭﺷﻣﺒ représente le
pronom affixe de la troisième personne masculine.
[21]
Le texte des deux derniers vers n’est pas bien certain ; aussi la
traduction est-elle très hasardée.
[22]
Es‑Sefe est le nom d’un endroit de la montagne appelée Abou Cobaïs et située
près de la Mecque.
[23]
On sait que les Arabes avaient beaucoup de noms pour désigner la ville de la
Mecque. Ces vers montrent, il me semble, que Baghdad était un de ces noms.
[24]
Peut‑être devons‑nous lire ﺎﻫ ﺮﻳﺎﻋ à la place
de ﺎﻬﻴ ﺮﺎﻋ , et traduire ainsi : « Et les prêteurs dans la tribu
importunaient les emprunteurs. »
[25]
Ces derniers vers ont été traduits par conjecture.
[26]
Ce personnage se nommait aussi Tholeïdjen et appartenait à la tribu de Himyer.
(Voy. l’Histoire des Berbers, vol. I, p. 38 de ma traduction.)
[27]
Dans l’usage vulgaire, le mot ﺮﻴﻣﺣ (Himyer) se prononce Hemîr.
[28]
Khordjan est le nom d’un défilé près de Médine. La position de Loud est inconnue
au traducteur.
[30]
Lisez ﻢﻬﻋﺮﺎﻗﻤ , avec tous les manuscrits.
[31]
La province du Zab se composait du Hodna, pays dont la ville principale est
maintenant Bou Saada, et du Zîban (pl. de Zab), pays dont la capitale est Biskera.
[32]
Ce poème est du mètre taouîl, mais on y remarque plusieurs
irrégularités. Le premier pied se compose quelquefois de deux syllabes longues.
Les voyelles finales ne s’y emploient pas toujours, et le dernier pied de
chaque second hémistiche est mokeiyed.
[33]
Variante ﻰﺣﻠﺍ ﺓﺎﺗﻔ ﻞﻮﻗﺗ , c’est‑à‑dire « les jeunes filles de la tribu
disent ». Le mot ﺎﻬﻀﺎﻫﻮ se trouve
dans tous les manuscrits, mais la signification m’est inconnue.
[34]
« Lors de l’invasion des Arabes hilaliens, dit notre auteur dans son Histoire des Berbers (t. III, p. 271),
Tlemcen obéissait à un souverain zenatien, appartenant à la famille des Beni
Yala et nommé Bakhti. Il eut pour vizir et général un Ifrénide appelé Abou
Soda Khalîfa. (Dans la traduction, le mot Ibn
est à supprimer.) Cet officier sortait assez souvent pour combattre les
Athbedj et les Zoghba (branches de la tribu de Hilal), et, en ces occasions, il
rassemblait sous son drapeau. . . . . toutes les tribus zenatiennes du Maghreb
central qui reconnaissaient l’autorité des Beni Yala. Dans un de ces conflits,
lequel eut lieu postérieurement à l’an 450 (1058 de J. C.), Abou Soda perdit la
vie. »
[35]
Littéral. « et ne sois pas bête ». L’adjectif ﻝﻳﺒﻫ appartient à la langue
vulgaire, mais on le remplace ordinairement par ﻝﻮﺒﻬﻤ , mot dérivé de la même
racine et signifiant « fou, sot ».
[36]
Les manuscrits portent ﻥﺍﺭ (ran),
mais on ne connaît en Algérie aucune vallée ou rivière de ce nom. Il y en
a, au contraire, plusieurs qui portent le nom de zan, mot qui désigne une espèce de chêne.
[37]
Ce vers, s’il est authentique, montre que l’ordre des derviches Eïçaoua est
très ancien en Algérie.
[38]
Je lis ﻝﻴﻤﺒ .
[39]
Je lis ﻰﺗﺎﻨﺯﻠﻠ , avec le traducteur turc.
La leçon ﻩﺍﺪﺒﻜ est bonne.
[40]
Je lis ﺲﻣﻻﺎﺑ , avec le traducteur turc, et
ﻚﺎﻨﻠﻣﺣ , avec tous les manuscrits. Ce dernier mot signifie « nous
vous avons imposé un fardeau », mais il est employé ici dans un sens
obscène.
[41]
Voy. l’Histoire des Berbers, t. I, p. 37. La pièce qui suit est du mètre taouîl ;
presque tous les mots prennent les voyelles finales, comme dans la poésie
régulière. Je dois faire observer que dans l’édition de Boulac, dans la
traduction turque et dans les manuscrits C et D, ce morceau est placé immédiatement
après celui qui commence par les mots ﺾﺎﻣ ﺍﺪﺒﺗ .
[42]
Pour ﺎﻣﺍ ﻮﻬﻔ , lisez ﺎﻣ ﺍﻮﻬﻗ .
[43]
La bonne leçon paraît être ﻦﻮﺒﻀﻣ .
[44]
Je lis ﺎﺧّﻮﺪﻣ .
[45]
Lisez ﺎﻫﺎﺘﺍ pour ﺎﻫﺎﺒﺍ , et ﺖﺧﻮﺪﺘ pour ﺖﺣﻮﺪﺘ .
[46]
Pour ﻚﻟﺬﻟ , lisez ﻚﻟﺬﻜ .
[47]
L’auteur se sert ici d’une expression qui ne s’emploie ordinairement qu’en
parlant des chevaux dont les sabots sont usés à force de marcher. Traduite à la
lettre, elle signifie ici : « propter attritionem (ungularum) quæ me
dedecoravit ».
[48]
Je lis avec la traduction turque et l’édition de Boulac :
[49]
Je lis ﺍﻮّﻭﻗﻮ , avec l’édition de Boulac
et la traduction turque. Pour ﺎﻬﻟﻳﻣﺠ , lisez ﺎﻬﻟﻳﻣﺤ . Le mot
ﺪﺍّﺪﺷ signifie « palefrenier,
celui qui sangle un cheval ou un chameau ». ﺎﻴﺍﻮﺣ
désigne les tapis ouatés qui se placent entre la selle et le dos de
l’animal. — En essayant de rétablir et de traduire ces textes, appartenant à un
langage tout à fait barbare, j’ai dû très souvent me guider d’après de simples
conjectures.
[50]
Pour ﺵﻮﺒﺣﻤ , lisez ﺲﻭﺒﺣﻣ , et remplacez ﺎﻬﻠ ﻰﻗﺒ
par ﺎﻬﻠﻴﻗﻴ .
[51]
Je lis ﻯﺯﺍﻭ , mot dérivé de la racine (ﻯﺯﺍ).
Je passe l’hémistiche suivant, dont je ne puis pas rétablir le texte. Outre les
variantes indiquées dans l’édition de Paris, on lit dans la traduction
turqueﺎﻬﻠﺒﺻﻨ ﻯﻭﺎﻀﺗﻟﺍ ﻖﻮﻔ ﺮﺣﻟﺍ ﻝﻅﺒ , et dans l’édition de Boulac ﺎﻬﻠﺗﺻﻨ ﻯﻭﺎﺼﺗﻟﺍ
ﻖﻮﻔ ﺮّﺣﻟﺍ ﻝﺿﻴ .
[52]
Les vrais noms du cherîf Ibn Hachem furent Chokr Ibn Abi ’l-Fotouh.
[53]
Cet hémistiche offre un exemple de l’emploi de la lettre chîn pour corroborer la négation, comme cela se fait dans la langue
vulgaire ; exemple : ma
nehabbouch « je ne le veux pas ».
[54]
Il faut lire ﺪﺟﻨﻠ ﺔﻣﻼﻣ ﺪﻴﺯﺗ ﻻﺍ ﺪﻋﺍ ﺮﻛﺷﺍ
.
[55]
Ici le texte est incertain.
[56]
Ce vers paraît signifier que le pays de Chokr
produit en abondance les plantes qui forment la meilleure nourriture des
chameaux, mais qu’il n’est pas favorable à la santé des jeunes enfants. Cela est
vrai du territoire de la Mecque. Dans l’édition de Paris, il faut lire ﻥﻬﻠ à la
place de ﻥﺎﻬﻟ , qui est une faute d’impression. L’édition de Boulac et la
traduction turque donnent ce vers sous la forme suivante :
, c’est‑à‑dire « si la fille de leur seigneur
était dans leur pays. . . . . ». Le reste du vers m’est inexplicable.
[57]
Pour ﻰﺣﻴ , lisez ﻲﺣﻴ .
[58]
La notice de cette tribu se trouve dans le premier volume de l’Histoire
des Berbers.
[59]
Les manuscrits C et D et l’édition de Boulac portent ﺎﻬﻠﻮﻗﻳ .
[60]
Ce poème est du mètre taouîl, et doit
se scander en tenant compte des voyelles qui marquent les inflexions
grammaticales. Il y a cependant quelques mots qui ne prennent pas la voyelle
finale et des pieds dont les formes sont plus ou moins irrégulières. Les
règles de la syntaxe n’y sont pas toujours observées.
[61]
Littéral. « et dans la manifestation des ténèbres (est) l’éloignement de sa
faiblesse (ﻪﻨﻫﻮ) ».
[62]
Dans cette pièce, le nom est quelquefois mis à l’accusatif avec le tenouîn, quand il devait être au
nominatif. Ici, ﺎﻤﺍﺭﺤ est mis pour ﻢﺍﺭﺤ .
[63]
Je lis ﺔﻴﻮﺍﺪﻋ , mot que je traduis par conjecture.
[64]
Pour ﺎﻬﻠ , lisez ﺎﻬﻠ ﻮ , avec tous les
manuscrits, et prononcez oulhan.
[65]
Le mot ﺎﻬﻴﺒ se présente deux fois dans ce vers, à la place de ﺎﻬﺑ . C’est une
licence tout à fait vulgaire, dont les poèmes en bon arabe n’offrent aucun
exemple.
[66]
Littéral. « excitent du désir dans les yeux ».
[67]
Lisez ﺎﻬﻣﺎﻣﺟ .
[68]
Je lis ﺖﻅﺤﻼﺘ . Les manuscrits offrent plusieurs autres variantes.
[69]
Les poètes arabes parlent des fleurs de la camomille là où ceux de l’Europe
mentionneraient le lis ou la pâquerette blanche.
[71]
L’édition de Boulac et la traduction turque portent ﺮﺟﺷﻣﻠﺍ , leçon que j’ai
adoptée.
[73]
Je lis ﻰﺴﺭﻓ et ﺔﻗﺎﺴﻤ .
[74]
Lisez ﻯﺪﻳﺒ et prononcez bîdi.
[75]
Pour ﺔﻨﻬﺠﺭﻤ , lisez ﺔّﻨﺣﺠﺭﻣ .
[76]
Pour ﻰﻔﻜﺗ , lisez ﻰﻔﻜﺒ .
[77]
La syllabe ﺎﻴ du mot ﺎﻴﺍ ﺩﺠ est, dans le dialecte vulgaire, le pronom
possessif de la première personne.
[78]
Cet hémistiche doit se lire ainsi :
ﺎﻴﺍ
[79]
J’adopte la leçon ﺍﺭﺒﻴ .
[80]
Il faut lire ﺎﻋﺮﺟ , forme vulgaire de ﺀﺎﻋﺮﺠ ; au reste, l’hémistiche doit
se lire ainsi :
[81]
Pour ﻞﻴﺯﻨ , lisez ﻞﻴﺯﻴ .
[82]
Je lis ﻢﻬﺎﺒﺧ .
[83]
Variantes : Ghîna ﺎﻨﻴﻐﺒ , Ghenya ﺎﻴﻨﻐﺒ .
[84]
Cet hémistiche a été altéré par les copistes ; les exemplaires du
traducteur turc portaient :
ﺦﻠﺍ ﻢﺍﺪ ﺎﻣ ﺎﻨ ﺪﻠﺍ ﻯﺫ
ﻯﺭﺗ , qui est probablement la bonne leçon ; dans l’édition de
Boulac on lit ﻢﺍﺪ ﺎﻣ ﺎﻴﻨﺪﻠﺍ .
[85]
Khaled Ibn Hamza, un des chefs des Arabes Kaoub, vivait au milieu du VIIIe siècle de
l’hégire. On trouvera dans plusieurs endroits de l’Histoire des Berbers le
récit de ses exploits et de ses intrigues.
[86]
En Afrique, le mot ﺪﻻﻮﺍ se prononce oulad ou oulèd.
[88]
Le texte de ce poème a subi tant d’altérations qu’il est impossible de le
reconstituer, même à l’aide des variantes fournies par les manuscrits, par
l’édition de Boûlac et par la traduction turque. Le nombre de ces variantes
surpasse tout ce qu’on peut imaginer ; il y a des vers où chaque mot en
offre trois ou quatre. On voit que les copistes ne comprenaient absolument rien
à ce qu’ils écrivaient. La pièce, dans son état actuel, offre tant de vers dont
le sens m’échappe que je n’entreprendrai pas de la traduire.
[89]
Voy. Histoire des Berbers, t.
I, p. 138, où il faut
lire : De Terdjem sortent les Kaoub.
[90]
Il faut lire ﻦﻴﻜﺍﺭﻓﺎﺘ ﻥﺒ ﺪﻣﺣﻣ ﻯﺍ , avec les manuscrits. (Voy. aussi
l’introduction, t. I, p. XXVIII.) Le ministre hafside Ibn Tafraguîn, qui
s’était rallié au sultan mérinide Abou ’l-Hacen, lors de la prise de
Tunis, l’abandonna quelque temps après (voy.
Histoire des Berbers. t. III, p. 24), et, s’étant ménagé l’appui des Arabes
Kaoub, il se rallia de nouveau au prince hafside Abou Ishac II et le replaça
sur le trône de l’Ifrîkiya (ibid. p.
42).
[91]
Le grand cheikh des Almohades était le second dignitaire de l’empire hafside et
prenait rang immédiatement après le sultan.
[92]
Je lis ﺎًﻬﺑﺎﺑ , avec le manuscrit D. La leçon ﺎﻬﻗﺎﻓ , offerte par un autre
manuscrit, pourrait, à la rigueur, donner un sens passable.
[93]
Le texte de ce poème étant très altéré, je ne réponds pas de l’exactitude de ma
traduction.
[94]
C’est‑à‑dire les Kaoub.
[95]
En arabe vulgaire, la dernière lettre du mot
ﻢﺪ est redoublée.
[96]
Je lis ﺐﺎﺘﻜ ﺭﻴﻣﻀﻠﺍ ﻮﺠ ﻰﻔﻮ ﺀﺍﺯﺠ , avec l’édition turque et en adoptant une variante
fournie par l’édition de Boulac.
[97]
Lisez ﺭﺎّﻁﺑ .
[98]
Je lis ﺓّﻮﺴﺒ , avec le texte fourni par
le traducteur turc et par l’édition de Boulac.
[99]
Je lis ﻩﺎﻨﻬﻔﻨ ; l’édition de Boulac et le texte du traducteur turc portent
ﻩﺎﻨﻬﻗﻨ .
[100]
J’adopte la leçon ﺎﻨﻬﻔﺴ , qui est celle de
l’édition turque et de l’édition de Boulac.
[101]
Je lis ﺪﺎﻏﻮﺍ , avec les mêmes éditions.
[102]
L’antichambre dans laquelle le maître d’une maison reçoit ses amis s’appelle la
skîfa.
[103]
El‑Baleki paraît être le nom d’un
cheval. Je ne sais quel chef le poète veut désigner ici.
[104]
Lisez ﺏﺎﻳﺫ . Il s’agit du célèbre chef arabe, Dîab Ibn Ghanem. (Voy. Hist.
des Berbers, t. I).
[105]
Tarchîch ou Tarsus est un des noms que les Arabes donnaient à la ville de
Tunis. (Voy. Bekri, Descript. de l’Afrique, page
91 du tirage à part.)
[106]
C’est par conjecture que je donne au mot
ﺎﻗﺑﺴ la signification de chevaux.
[108]
Ne comprenant pas la fin de l’hémistiche, je la laisse sans essayer de la traduire.
[109]
Le mot ﻥﻟﺍ est une altération barbare de
ﻦﺁ ﻰﻠﺍ .
[110]
Je lis ﺔﻣﻬﺒ , avec le traducteur turc et l’édition de Boulac.
[111]
Le mot ﺍﻭﺗﺍﺭﻴﺧ est une altération de ﻪُﺗﺍﺭﻳﺧ
.
[112]
Je lis ﺎﻴﺎﻨﺛﻟﺍ , avec le traducteur turc.
[113]
Il faut lire ﺔﻠﻭﺴﻠ ﻻ ﺍﺭﺸﻠﺎﺒ .
[114]
Je lis ﺏﻼﺠﺑ avec le traducteur turc et
je regarde ce mot comme le pluriel de ﺏﻠﺠ . La particule ﺎﻣ est explétive.
[115]
Le mot ﻥﻠﺍ est employé ici pour ﻥﻻﺁ .
[116]
Je lis ﺔﻣﻼﻣ ﺍﻮﻗﺘﺍ ﻻﻮ , avec l’édition de Boulac et la traduction turque.
[117]
Je lis :
, en combinant les leçons offertes par la
traduction turque et l’édition de Boulac. Les manuscrits C et D offrent la
leçon ﻞﻫﺪ .
[118] ﻩﺎﺗﺍﻭ est
mis ici pour ﻩﺎﻂﺍﻭ . L’auteur du poème ou son secrétaire ne savait pas
l’orthographe.
[119]
Il faut lire ﻰﺘﻮﺯﻋ ﺍﻮﻔ ou bien ﺎﻨﻮﺯﻋ ﺍﻮﻔ
. Les manuscrits et les éditions imprimées offrent l’une ou l’autre de ces
leçons.
[120]
Lisez ﺪﺎﻏﻮﻻﺍ ﺕﺣﺮّﺒﻮ .
[121]
La bonne leçon est ﻲﺣﻴ ﺎﻤ .
[122]
Il faut lire ﻪﺤﻮﺮﺒ et ﺡﻮﺮﺒ .
[123]
Lisez ﻰﻁﻋ .
[124]
Lisez ﻢﺎﻬﺴﺎﺒ .
[125]
Je lis ﻕﺎﻴﻀﻴ (forme vulgaire), avec les
manuscrits et les éditions.
[126]
Le texte du second hémistiche est altéré et n’offre pas de sens.
[127]
Lisez ّﺲﺠﺒ .
[128]
Lisez ﻩﻭﻠﻀﺗ .
[129]
Pour ﻪﻨﻜﻟ , lisez ﻪﻨﺎﻜ .
[130]
Lisez ﻞﺪﺑ .
[131]
La bonne leçon est ﺔﻨﻃﻔ .
[132]
Le sens de ce vers est incertain.
[133]
Je lis ﻞﻋﺎﻴﻔ , avec le traducteur turc et l’édition de Boulac. Le singulier de ce
mot doit être ﻞﻌﻳﻔ .
[134]
Le mot ﻥﻠﺍ est mis ici pour ﻥﺍ ﻰﻠﺍ .
[135]
Littéral. « soit ardent ».
[136]
Il faut lire ﺎﻣﻮﺪﻨ , avec la traduction turque, l’édition de Boulac et
plusieurs manuscrits.
[137]
Cela paraît signifier : « dans les temps de disette, il faut se
contenter de ce qu’on a sous la main, en fait de vivres ».
[138]
Les Beni Amer continuèrent jusqu’à ces dernières années à former une des tribus
les plus puissantes de la province d’Oran.
[139]
Notre auteur a donné un long
chapitre sur les Zoghba (prononcez Zorba) dans le premier volume de son
Histoire des Berbers.
[140]
Le texte de ce poème, qui renferme quarante et un vers, est tellement altéré,
que je n’essaye pas de le traduire en entier. Je me borne à en expliquer le
commencement, mais en faisant observer que le premier hémistiche du premier
vers ne se retrouve plus.
[141]
Il faut lire ﺾﻳﺮﻗ à la place de ﻅﻳﺭﻘ . Le
mot ﺖﺎﻳﺎﺒﺍ paraît être le diminutif de
ﺕﺎﻴﺒﺍ .
[142]
Je lis ﺎﻗﺷﻠﺍ ﻥﺎﻜ .
[143]
Littéral. « dont la séparation a changé la position ».
[144]
Littéral. « pour refroidir les mèches des feux d’un cœur ».
[145]
Lisez ﺍﺬﺍ .
[146]
Je n’essaye pas de traduire cette pièce ; le texte en est tellement
corrompu qu’on n’y comprend presque rien. Les manuscrits C et D, l’édition de
Boulac et la traduction turque ne la donnent pas.
[147]
Dans l’Histoire des Berbers, t.
I, se trouve la notice de ces tribus.
[148]
Le mot mowascheha signifie « orné d’une ceinture brodée (wichah) ». Le wichah, ou ceinture des
femmes, était orné de deux rangs de perles et de pierres précieuses, placées
alternativement. Il s’attachait, par le milieu, entre les épaules, passait sur
les hanches et se bouclait sur le devant du corps, au‑dessous du nombril. Les mowascheha sont des odes composées de plusieurs
stances. La stance, dans sa forme la plus ordinaire, renfermait cinq vers, dont
les quatre premiers rimaient ensemble, et dont le cinquième rimait avec tous
les cinquièmes vers des stances suivantes. On trouve, cependant, beaucoup de mowascheha dont les stances se composent de quatre,
cinq ou un plus grand nombre de vers, à rimes croisées. Le mot zedjel, en arabe, signifie
« modulation ». En Espagne, les poètes l’employaient pour désigner
leurs chansons ou ballades. Les formes du zedjel
étaient très nombreuses.
[149]
Après ﺎّﻨﻓ inscrivez ﻪﻨﻣ
.
[150]
On désigne par le terme simt « ligne » les stances dont se
composent le mowascheha. Le mot ghosn « branche »
désigne les vers dont se composent les odes (mowascheha) et les chansons ou ballades (zedjel) espagnoles.
[151]
L’orthographe de ces noms est incertaine : El‑Maccari (t. II, p. 361)
écrit Moufa ﻰﻔﺎﻌﻣ , à la
place de Maufer ﺭﻓﺎﻌﻣ , et telle est aussi l’orthographe d’Ibn el-Abbar.
Le groupe ﻯﺭﻴﺭﻴﻨ est ponctué de diverses
manières dans les manuscrits et peut se prononcer de plusieurs manières. Je
lis ﻯﺭﻴﺯﻴﻨ « natif de
Neizîr ». Il y avait un village près de Chiraz qui portait ce nom.
Quoiqu’il en soit, le poète qu’on appelait ainsi vécut dans la dernière moitié
du IIIe siècle de l’hégire.
[152]
Abd Allah el‑Merouani, septième souverain omeïade qui régna en Espagne, monta
sur le trône l’an 275 de l’hégire (888 de J. C.).
[153]
Voyez la 1e partie, page 30. Ce poète se nommait Omar ; Ibn Khaldoun s’est trompé
ici en lui donnant le nom d’Abd Allah.
[154]
El-Motacem Ibn Somadih monta sur le trône l’an 105, de J. C. (443‑444 de
l’hégire).
[155]
Abd Allah Ibn es‑Cîd, surnommé el‑Aalem el‑Batalyauci (le savant de Badajoz), se
distingua surtout comme grammairien et philologue. Cet auteur mourut à Valence,
l’an 521 (1127 de J. C.), laissant
plusieurs ouvrages tant en prose qu’en vers.
[156]
Je transcris ici le texte arabe de cette pièce,
afin de mettre en évidence la versification que le poète avait adoptée :
Bedro
temm, chems doha, ghosn neca, misko chemm ;
Ma atemm, ma
aoudeha, ma aoureca, ma ansem ;
La
djerem, men lameha, cad acheca, cad horem.
[157]
Le verbe négatif ﺲﻴﻠ devint ﺶِﻟ dans le dialecte vulgaire des Espagnols.
[158]
Il faut lire ﻚﺎﺴﻋ à la place de ﺭﻛﺎﺴﻋ . La bonne leçon se trouve dans l’édition
de Boulac, dans la traduction turque, dans la Vie de Liçan ed‑Dîn d’El‑Maccari, édition de Boulac, t. III, p. ۶-۷,
et dans le manuscrit de cet ouvrage appartenant à la Bibliothèque impériale et
portant le n° 7759, ancien fonds. (Voy. fol. 92 recto.) El‑Maccari
a reproduit dans son ouvrage plusieurs extraits du chapitre d’Ibn Khaldoun sur
les odes et les chansons.
[159]
Je donne ici la transcription du texte arabe de ces deux morceaux, pour le
motif indiqué dans la note ci-dessus :
El‑aoud cad terennem bi-abdâi telhîn,
Wa chekket el‑medaneb rîad el‑besatîn.
Takhter wa lich teslem ; Asak el-Mamoun
Moraouwâ el-ketaïb Yahya ben dhi’n‑Noun ?
[160]
Abou Bekr Yahya Ibn Baki, natif de Cordoue, fut un des poètes les plus gracieux
que l’Espagne musulmane ait produits. Il vécut dans la misère, comme la
plupart de ses confrères ; les souverains almoravides étaient trop
ignorants, ils méprisaient trop les belles‑lettres pour donner des
encouragements à des poètes dont ils comprenaient à peine la langue. On trouve
dans l’ouvrage d’El‑Maccari sur l’Espagne un assez grand nombre de pièces
composées par Ibn Baki.
[161]
Abou Djafer Ibn Horeïra el‑Aamâ et-Toteïli était, comme son ami, Ibn Baki, un
véritable poète. El‑Maccari nous a conservé plusieurs de ses pièces.
[162]
Je transcris ici ce morceau :
Kîfa ’s‑sebîlou ila
Sabri, oua fi ’l-maalimi,
Achdjanou !
Oua‑’r‑rekbou ouset el‑fela,
Bel‑khourdi ’n‑néaimi,
Cad banou.
[163]
Voici la transcription de ce morceau :
Dhahek an
djoman, safer an bedri,
Dhac anho’z‑zeman,
oua hawaho
sadri.
[164]
Ce personnage portait le surnom d’Abou ’l-Khattab, et appartenait probablement
à la même famille que le célèbre médecin Avenzoar (Ibn Zohr).
[165]
Ce poète se nommait Abou Bekr Mohammed Ibn el‑Ansari el‑Abiad. Selon El-Maccari,
il fut mis à mort par un certain Ez‑Zobeïr, émir de Cordoue, qu’il avait attaqué
dans ses vers.
[166]
Le célèbre philosophe Ibn Baddja (Avenpace) s’était distingué aussi comme
poète. Il mourut à Fez, l’an 533 (1138-1139 de J. C.).
[167]
Ce sobriquet signifie « fils de la pouliche ». C’est un mot arabe
berbérisé. Celui à qui on l’avait donné était beau‑frère du roi almoravide Ali
Ibn Youçof et se nommait Abou Bekr Ibn Ibrahîm. (Voy. l’Hist. des musulmans
d’Espagne de M. Dozy, t. IV, p. 262.)
[168]
Pour ﺎﻨﻣ , lisez ﻪﻨﻣ avec les manuscrits.
[169]
Deux membres de la famille Zohr portaient le surnom d’Abou Bekr : l’un
était un savant jurisconsulte et mourut à Talavera l’an 422 (1031 de J.
C.) ; l’autre, qui s’était distingué comme médecin, grammairien et poète,
fut attaché au service du sultan almohade Yacoub el‑Mansour et mourut l’an 595
(1119 de J. C.). Je crois qu’il s’agit du premier dans le récit d’Ibn Khaldoun.
[170]
Il faut lire ﺡﺎﺷﻮﻠﺍ sans techdîd et ﻰﻔﻮﺍ en un seul mot. Dans le dixième vers (p. 394,
l. 7, du texte arabe), il faut lire ﺪﻬﻋ à la place de ﻯﺪﻬﻋ .
[171]
Voici la transcription de la première stance de cette pièce :
Ma ledda lî cherbou rahi
Ala riadi’l-akahi ;
Lou la hedim el‑oushahi,
Ida
’nthena fi ’s‑sebahi,
Aufa ’l-asîl,
Adha igoul :
Ma lit‑chemoul
Letemèt khaddi
Oua lil‑chemal ?
Habbèt fe‑mal
Ghosnou tidal
Dommahou burdi.
[172]
Ce personnage m’est inconnu.
[173]
Je soupçonne que ce Hatem est celui auquel El-Maccari (t. II, p. ۳۳۷) donne le
nom de Hatem, fils de Hatem Ibn Saîd, et qui mourut en l’an 593 (1196‑1197 de J. C.)
[174]
Je ne trouve aucun renseignement sur ce poète ni sur celui dont le nom est
mentionné un peu plus loin.
[175]
L’auteur a sans doute emprunté à un ouvrage que nous ne connaissons pas, peut-être
le Moghrib d’Ibn Saîd, les
indications qu’il vient de donner. La majeure partie de celles qui suivent est
empruntée à cet ouvrage.
[176]
Ce personnage est inconnu.
[177]
Ibn Saîd, le célèbre géographe, historien et littérateur, mourut en 685 (1286-1287 de J. C.).
[178]
Sehl Ibn Malek, littérateur d’une grande réputation, était natif de Grenade.
Nous avons de lui quelques vers composés, les uns à Ceuta, en l’an 581
(1185-1186 de J. C.), et les autres à Grenade, en 637 (1239‑1240 de J. C.).
[179]
Estepa est située dans la province de Séville.
[180]
Il faut lire ﺔﻠﻗﻣ et ﺡﺎﺑﺻﻠﺍ , à la place
de ﻪﻠﻗﻣ et ﺝﺎﺒﺼﻟﺍ .
[181]
La forme de cette pièce est, en effet, très originale, ainsi qu’on peut le voir
dans la transcription suivante. Dans ce petit poème, comme dans presque toutes
les odes, la prononciation est celle de la langue vulgaire.
Ma lil‑mouleh min sokrou la yofîc ya
lou sekrane !
Hel tostaâd aïyamna bal‑khalîdj oua
lîalîna ?
Id yostafad min en‑nesîm il‑aridj misko Darîna.
Oua id yokad hosn el‑mekan il‑behidj an
yohyîna.
Nehron atolleh douh alîh anîc mourec
fînane.
Oua’l-ma yedjri ou âïm oua gharîc min
djena rîban.
[182]
Darin était un port de mer de la province de Bahreïn en Arahie. On y importait
du musc qui se tirait de l’Inde.
[183]
Les poètes comparent aux feuilles de myrte, et aussi au tissu d’une cotte de
mailles, les rides qu’un léger zéphyr forme sur la surface d’un lac.
[184]
Dans cette pièce il faut lire ﻮﻠﺧﻨ et ﻝﻣﻌﻨﻮ . Ces verbes sont à la première personne
du singulier, car tout le morceau est en arabe vulgaire. ﻉﺎﺳ est pour ﺔﻋﺎﺴ . ﺶﻟﻔ
est la forme vulgaire espagnole de ﺱﻴﻟﻔ .
[185]
Mohr Ibn Ferès vivait encore en l’an 581 (1185‑1186 de J. C.).
[186]
Voici cette pièce, en caractères romains :
Ya hadjeri ! hel ila l’ ousali
Minnek sebil ?
Aou hel tera an houak sali
Colbo ’l‑alîl.
[187]
La particule ﺎﻣ dans ﺓﺮﻤ ﺎﻣ ﺭﻴﻏ est explétive.
[188]
Abou ’l-Hacen Ali Ibn Djaber ed‑Debbadj, natif de Séville, était très
versé dans la philologie de la langue arabe et dans la philosophie. Ses
contemporains le regardaient comme le plus grand philosophe de l’Occident. Son
savoir et sa piété étaient si remarquables que le souverain almoravide Ali, fils de Youçof Ibn Tachefîn, l’appela à la cour de Maroc et l’admit
dans son intimité. Il le chargea même de soutenir une controverse théologique
contre Mohammed Ibn Toumert, le même qui, sous le titre du Mehdi, fonda plus
tard l’empire des Almohades. (Voy. l’Histoire
des Berbers, t. II, p. 167.)
[189]
Pour ﺪﻤﺠ , lisez ﺪﻣﺤ .
[190]
Le poète a probablement supposé que c’était l’aigle (la constellation ainsi nommée)
qui, par son vol, tenait en mouvement la sphère céleste.
[191]
Le mot ﻥﺴﺎﺤﻣ doit être supprimé ;
il ne se trouve pas dans les manuscrits.
[192]
Je lis ﻝﺎﺼﻮﻟﺍ ﺀﺎﺴﻮ avec le traducteur
turc et l’éditon de Boulac.
[193]
Le mot ﻝﺎﺣﻣ signifie « ce qui n’est
pas réel ».
[194]
Pour ﻚﺎﺒﺤ , lisez ﻚﺎﻴﺤ , avec les manuscrits. Dans les deux poèmes qui
suivent, tous les vers impairs riment en a, et les vers pairs, pris par deux ou
par trois, riment ensemble. Ainsi la rime est invariable dans les vers
impairs, et varie, jusqu’à un certain point, dans les vers pairs.
[195]
Il faut lire ﺔﺗﺑﺴ .
[196]
Pour ﺎﻨﻳﻓ , lisez ﺎﻬﻳﻔ .
[197]
Pour ﺬﺍ , lisez ﺍﺬﺍ .
[198]
Il y a dans ce vers un jeu de mots intraduisible. Noman, fils de Ma es‑Sema,
fut un roi de Hira dans les temps antéislamites ; Noman est le
vrai nom d’Abou Hanîfa, fondateur d’un des quatre rites orthodoxes, et noman
signifie anémone. Malek était fondateur d’un de ces rites et Anès était
un de ses précepteurs.
[199]
Je lis ﻢﻮﺟﻫ à la place de ﻡﻮﺠ , en
adoptant la leçon d’El-Maccari.
[200]
Le poète a vu une ressemblance entre la feuille de myrte et l’oreille de
cheval.
[201]
Pour ﺖّﻳﻫ , lisez ﺖّﺑﻫ .
[202]
Coran, sour. XIV, vers 7.
[203]
Pour ﻥﻣ , lisez ﻰﻔ .
[204]
Pour ﺎﻣﺪﻠﺍ , lisez ﺎﻣﺫﻠﺍ .
[205]
Ibn Khaldoun a supprimé ici dix doubles hémistiches formant la fin du poème et
renfermant l’éloge du prince. On les trouvera dans la Vie de Lisan ed‑Dîn, composée
par El‑Maccari.
[206]
Le poète Hibet Allah Ibn Djafer Sena ’l-Molk, natif d’Égypte, mourut au
Caire, l’an 608 (1211-1212 de J. C.).
[207]
Le mot ﻪﻴﺑ est mis ici pour ﻪﺑ . Quelques
manuscrits portent ﻪﻳﻓ .
[208]
Il faut lire ﻮّﻣﺿ et ﻭﺗﺎﻤﻬﺴﻠ . Le ﻭ final de ces mots représente le pronom
affixe de la troisième personne masculine du singulier.
[209]
Pour ﻕﻠﻐﻴ , lisez ﻕﻠﻗﻴ , et pour ﺍﻮﺒﺎﺼ , lisez ﻪﺗﺎﺑﺎﺻ . Ce dernier mot est une altération
du nom d’action ﺔﺑﺎﺼﺍ , joint au pronom
affixe de la troisième personne du singulier.
[210]
Le mot ﻥﺒﺍ se lit dans la plupart des
manuscrits.
[211]
ﻥﺍﻭﻠﺎﺑ est une contraction vulgaire des
mots ﻥﺃ ﻪﻠﺎﺑ .
[212]
Il faut lire ﻪﻓﺍﺼﻓﺻﻔ ﻝﻴﻗﺗ ﻥﻴﻠﻗﻣﻠﺍﻭ , ce qui, en bon arabe,
s’écrirait ﻪﻓﺍﺼﻓﺻ ﻰﻔ ﻝﻴﻗﺗ ﻥﻴﻠﻳﻗﻣﻠﺍﻭ .
[213]
Je lis ﻯﺭﺣﺍ , avec deux manuscrits.
[214]
ﻪﻨﺷﻠ est une altération de ﻥﺴﻠ , 3e p. fém. pl. du verbe négatif ﺲﻳﻠ
.
[215]
Pour ﻭﺗﺎﻳﺪﻳ , lisez ﻪﺘﺍﺪﻴﺪﻴ .
[216]
Il faut insérer ici les mots ﻪﻳﻔ ﻞﻮﻗﻴ .
[217]
Lisez ﻒﻳﺮﺷﻠﺍ .
[218] ﺎﻣﻟﺍ est
mis ici pour ﺎﻣ ﻰﻠﺍ .
[219]
ﻰﻨﻴﻋ est mis ici pour ٍﻥﻳﻋ . Lisez ﺮﻅﻨﺗ à
la place de ﺮﻅﻨﻨ .
[220] Medeghlîs
ou Medghalîs est un sobriquet
qui n’appartient pas à la langue arabe. Le poète qu’on désignait ainsi se
nommait Abou Abd Allah Ibn el‑Haddj.
[221]
Voici le texte de ce vers, qui a été omis dans l’édition de Paris, mais qui se
trouve dans la traduction turque et dans quatre manuscrits :
[222]
Lisez ﺎﻣﻠ à la place de ﺎﻣﻜ .
[223]
Porter un collier signifie croire aux paroles d’autrui ; le collier est
aussi l’emblème de l’esclavage ; ici l’expression « puisse Dieu te
revêtir d’un collier » paraît signifier « puisse‑t‑il te récompenser
de tes conseils dont je n’ai que faire. »
[224]
Pour ﻝﻮﻘﻴ , lisez ﻝﻮﻘﺗ .
[225] ﺭﻮﻣ est mis ici pour ّﺭَﻤ .
[226]
Il faut lire ﻝّﻤﻬﺗﻨ .
[227]
Les mots ﻩﺭﺪﻗ ﻮﻠ ﺶﻠ représentent la manière dont les musulmans espagnols prononçaient
l’expression ﻩﺭﺪﻗ ﻪﻟ ﺲﻳﻠ .
[228]
En‑Nacer, le quatrième souverain de la dynastie ahmohade, enleva l’île de Majorque
aux Almoravides vers la fin du VIe siècle de l’hégire ou au commencement du VIIe. Les Baléares tombèrent bientôt après au pouvoir
des Catalans, Jayme Ier, roi d’Aragon,
s’en étant emparé l’an 1230 de J. C. (627 de l’hégire).
[229]
L’orthographe de ce nom est incertaine.
[230]
La bonne leçon est ﻰﻨﺗﻴﻟﺎﻴ .
[231]
Je regarde ﻞﺘﻓﺍ comme une altération de
ﻦﺗﻔﺍ .
[232]
Je lis ﺪّﺪﺠﺗ , avec l’édition de Boulac et la traduction turque.
[233]
Chochteri et Tosteri signifient natif de Toster, ville située dans le
Khouzestan. Il y avait un ascète nommé Sehl et‑Tosteri, qui acquit une grande
réputation par la sainteté de sa vie, et qui mourut à Basra en 283 (896 de J.
C.). C’est peut‑être de ce personnage que l’auteur veut parler.
[234]
Pour ﻞﻮﺯﻨﻠﺍ ﻥﻴﺒﻮ , lisez ﻞﻮﺯﻨﻠﺍﻮ .
[235]
Ce vers, comme l’auteur nous le donne à entendre, exprime une idée mystique et
paraît signifier : « Ceux qui ont été tirés du néant disparaissent du
monde, et celui qui n’a jamais cessé d’exister durera toujours. »
[236]
Xenîl est le nom de la rivière qui coule près de Grenade. Il faut lire ﻞﻴﻨﺷ .
[237]
Il faut lire ﺎﻬﻳﻔ ﺎﻁﻭ , en deux mots.
[238]
ﺶﻻﻮ est une forme vulgaire de ُﻰﺷ ّﻯﻻﻮ ; le mot ﺎﻋﺎﻗﺭ s’écrit ﺔﻋﺎﻓﺭ
en bon arabe.
[239]
Il faut remplacer ﺎﻗﻗﺷ par ﺎﻗﻔﺷ , altération
du mot ﺔﻗﻔﺷ .
[240]
La traduction turque et l’édition de Boulac offrent la leçon ﺵﺭﺷﺭﺘ à la place de ﺵﺘﺭﺘ . Les larmes qui coulent
peuvent signifier, non seulement celles de l’amant, mais les gouttes d’eau avec
lesquelles on arrose les braises d’une forge, afin de les faire brûler avec
plus d’intensité.
[241]
Le mot arabe est ghazou ; en
Afrique on dit ghazia ou razia.
[242]
Abou Abd Allah Mohammed el‑Louchi, médecin distingué, mourut en Égypte entre
les années 660 (1262 de J. C.) et 670.
[243]
Dans cette pièce, l’auteur a employé une foule d’expressions vulgaires, et n’a
montré que bien peu de respect pour l’orthographe.
[244]
Le mot ﻖﻟﻳﻣ est formé irrégulièrement du
verbe ﻰﻗﻟ .
[245]
Lisez ﷲﺎﻴ .
[246]
Je passe ici un hémistiche qui paraît signifier : « et il (le temps
ou la fortune) n’est plus capable de laisser échapper le scorpion de sa
main. » — En arabe, le scorpion est l’emblème de la délation ; il
signifie aussi « soucis, remords. » — Le manuscrit suivi par le traducteur
turc portait : ﺍﻮﺑﻗﺭﻋ ﻪﻴﺪﻴ ﻥﻣ ﻮﺘﻔﺘﻜ ﻰّﻟﺍﻮ
, ce qui peut signifier : « il avait les mains attachées
derrière le dos. » — L’édition de Boulac porte : ﺍﻮﺑﺭﻗﻋ ﻪﻴﺭﻴ ﻥﻣ
ﻪﺘﻟﻗﻣﻛ ﺵﺍﻮ , mots dont je ne saisis pas
le sens.
[247]
Les mots ﺎﻤﻔ ﺍﻭﺭﻣ sont mis ici pour ﺎﻣﻳﻔ
ًﺓّﺭﻤ . Au reste, cette pièce offre beaucoup
de fautes de grammaire et d’orthographe.
[248]
Boneïa ou bonn est une espèce de café. (Voy. Chrestomathie arabe de M. de Sacy, t. I, p. 412.)
[249]
Je lis ﺍﻮﺑﺣﻨﺗ ﻯﺭﻨ .
[250]
Pour ﻰﻠﺍﺪﻋ , lisez ﻰﻟﺍّﺫَﻋ .
[251]
Littéral. « Faut-il que je le lise par Dieu ? » L’expression ﺍﻮﺭﻗﻨﻜ
ﺶﻼﻋ est une altération de ﻩﺀﺭﻗﻨ ﻥﻮﻜﻨ ﺀﻰﺷ ّﻯﺍ ﻰﻠﻋ . L’édition de Boulac porte : ﺶﻼﻋ
ﺍﻮﺑﺘﻛﺘ ﻮﺍ ﻪﻴﻠﺎﺒ ﺍﻮﺭﻔﻛﺘ, et le traducteur
turc a lu :
ﺶﻼﻋ ﺍﻮﺑﺫﻜﺗﻭ ﻪﻴﻠﺎﺒ ﻭ ﺭﻔﻜﺘ .
[252]
Je lis ﻰﺒﻅ , avec la traduction turque et l’édition de Boulac.
[253]
Le ghada est une espèce de bois dont
la braise donne beaucoup de chaleur et se conserve longtemps allumée.
[254] ﻢﻫﻮﻟﺎﺒ
est mis ici pour ﻢﻬﻠﺎﺒ .
[255]
Lisez ﻡﺛﻮ . Le second hémistiche doit être reconstruit ainsi : ﺍﻮﺑﺪﻨﻴ ﺎﻣ ﺪﻌﺒ
ﻥﻣ ﺍﻮﺤﺭﻔﺗﻮ .
[256]
Variante ﻡﻴﻮﻔ . Ce mot est le diminutif de ﻢﻔ ; ﻢﻳﻣﻔ est aussi le diminutif de ّﻢﻔ , prononcé avec
un double m, selon l’usage de la langue vulgaire.
[257]
ﺎﻤﻻﺍ est mis ici pour ﺔﻣﻻﺍ .
[258]
Pour ﻥﺑﺭﺎﺷﻭ , lisez ﺏﺭﺎﺷﻭ . Le mot ﺵﻠ est mis pour ﺀﻰﺷ ّﻯﻻ . L’expression ﺪﻴﺭﻴ ﺪﻴﺭﻴ ﺶﻻ
paraît signifier : « elle fait ce qu’elle veut. »
[259]
Pour ﺎﻬﺑﻠﻗ ﺖﻣﻠﻋ , lisez ﺎﻬﻠﺑﻗ ﺖﻣﻠﻋ ﺎﻣ .
[260]
ﺎﻴﻼﺼ est une forme vulgaire de ﺔﻴﻼﺼ
; ﻚﻴﺪ est l’équivalent de ﻚﻠﺗ .
[261]
Pour ﻕﻴﻗﺭ ﻥﻣ , il faut lire ﻪﺘﻗﺭ ﻥﻣ , avec le manuscrit C, l’édition de Boulac
et la traduction turque.
[262]
Les mots ﻰﻨﺴ ﻚﺪﺒﻋ ﺍﺭﺘ
ﺫﺧ n’offrent aucun sens : le traducteur turc a lu ﻰﺘﺴ à la place de ﻰﻨﺴ et a donné en marge une autre leçon,
savoir : ﻖﺣ ﻚﺒﺗﻋ ﺪﻴﺪﺠ ﻞﻮﻘﺗ , celle qui se retrouve dans l’édition de Boulac.
Je lis ﻚﺒﺗﻋ ﻯﺭﺗ ﺫﺧ ﻖﺣ . L’expression ﻯﺭﺗ
ﺫﺧ signifie : « voici ! prends » ; c’est-à-dire :
reçois mon aveu.
[263]
L’édition turque, celle de Boulac et les manuscrits C et D insèrent ici deux
vers que je n’essaie pas de traduire, tant ils offrent de variantes.
[264]
Pour ﻦﻣﻣ , lisez ﻥﻣﻔ . ﻰﻠﻗ est une altération
de ﻰﻠ ﻞﻗ .
[265]
Je lis ﺍﻮﺑﻳﻁﻔ à la place de ﺍﻮﺑﻳﻁﻨ
; mais le vers est évidemment corrompu.
[266]
Les manuscrits portent ﺪﺭﺍﻮ sans la
conjonction ; l’auteur, qui était évidemment un homme sans instruction, avait
voulu écrire ﺪﺭﺍﻮﻮ ﺭﺪﺎﺻ , expression consacrée, qu’il se rappelait
imparfaitement.
[267]
La variante du manuscrit D, indiquée dans l’édition de Paris, mérite d’être
signalée comme offrant un étrange exemple de l’orthographe vulgaire : ﻒﻨﻜ pour
ﻰﻔ ﻥﺎﻛ .
[268]
Après ﺪﻌﺑ , insérez ﺎﻣ .
[269]
Pour ﻰﺜﻴ , lisez ﻰﻨﺛﻴ .
[270]
Pour ﻪﺗﺒﻳ , lisez ﻪﻳﻨﺒ .
[271]
La famille d’Ibn el-Ahmer, qui régnait à Grenade, s’appelait les Beni Nasr
(enfants de Nasr).
[272]
Littéral. « les lunes ».
[273]
Pour ﻰﻨﻐﺑ , lisez ﻰﻨﻐﺗ . Cacîd,
pour cacîda, est l’orthographe du texte.
[274]
Je lis ْﺭِّﺪَﺧ .
[275]
Dans la pièce qui suit, l’auteur n’observe pas toujours ces règles ; il
s’en écarte très souvent.
[276]
Dans cette pièce toutes les idées sont évidemment empruntées à la poésie
persane. Elles sont tout à fait étrangères à la poésie arabe.
[277]
Pour ﺎﻣﻭ , lisez ﺀﺎﻣﻭ .
[278]
Pour ﻖﺭﺗﻔﺍ , lisez ﻖﺍﺭﺗﻔﺍ .
[279]
Pour ﺭﻴﺜﻜ , lisez ﺭﺜﻨﻛ .
[280]
Le mot noria (en arabe naaoura ﺓﺭﻭﻋﺎﻨ ), sert à désigner
la roue hydraulique, ou roue à chapelets. Dans la province d’Alger on donne
ordinairement à ces machines le nom de doulab.
[281]
Littéral. « les seins des robes ». Il faut lire ﺐﻮﻴﺠ .
[282]
Littéral. « le musc des nuages ».
[283]
Pour ﺐﺿﻗﻠﺍ , lisez ﺐﻴﺿﻗﻠﺍ .
[284]
Pour ﻭﺑﻭﺜ ﻰﻔ , lisez ﻭﺑﻭﺜ ﻥﻣ .
[285]
Variantes fausses ﺎﻣﺒ , ﻩﺎﻣﺒ , ﻩﺎﻐﺑ .
[286]
Lisez ﻯﻮﺗﻠﺍﻮ ﺪﺳﻭﺗ .
[287]
Lisez ﻰﻘﺑﻨ et ﺡﻮﻨﻨ .
[288]
Tous les manuscrits portent ﻮﻟ , qui est certainement la leçon du texte
original.
[289]
Pour ﻰﻠﻋ , lisez ﻥﻣ .
[290]
ﻥﺎﻜ est mis ici pour ﺖﻨﻛ , d’après une licence de la langue vulgaire.
[291]
Pour ﻥﺎﻜﻭ ﺎﻣﺪ , lisez ﻥﺎﻜ ﺪﺎﻣﺭ .
[292]
Il faut lire ﻰﻨﺗﺠ ﻮﻠ , c’est-à-dire ﻰﻨﺗ ﺀﺎﺠ ﻮﻠ
.
[293]
Je passe le vers suivant, parce que, dans son état actuel, il n’offre pas un
sens raisonnable.
[294]
Les manuscrits C et D portent ﺖﺒﻀﺧﻨﺍﻮ .
[295]
Je lis ﺔﻟﻌﺷ et j’adopte la leçon ﺩﺎﻣﺭ ﺭﺼ ﺪﺳﺠﻟﻟﻮ
, celle qui est offerte par les manuscrits C et D.
[296]
Ces deux derniers vers ne se trouvent pas dans les manuscrits C et D ; ils
manquent également dans l’édition de Boulac et dans la traduction turque.
[297]
En caractères arabes ﻯﺯﺎﻛ ; le manuscrit B porte ﻯﺭﺎﻜﻠﺍ (kari), le manuscrit C ﻯﺬﺎﻜﻠﺍ (kadhi), et la traduction turque ﻯﺭﺎﻜﻣ (mekari). De ces leçons je ne sais
quelle est la bonne.
[298]
Taza, ou, selon la prononciation européenne, Téza, est le nom d’une
ville située à moitié chemin du Molouia à Fez. Je profite de cette occasion
pour faire observer que le nom de la ville appelée Fez par les
Européens se prononce Faz par les gens du pays.
[299]
Je lis ﻩﻮّﻠﺍ , mot que je regarde comme une altération de ﻩﻮّﻠﻮ .
[300]
Je lis ﻰﺠﺗﻠﻳ . Le mot ﻯﺪﺍ est mis pour ﺍﺫﺍ
.
[301]
Il faut lire ﻥﻣﻠ , avec les manuscrits C et D et la traduction turque.
[302]
Le mot ﺶﺍﺭﻓ est une altération de ﺲﺍﺭﻠﺍ ﻰﻔ ou de ﺲﺍﺭ ﻰﻔ . L’auteur du poème, ne sachant
pas l’orthographe, a écrit ﻎﺑﺻﻨ pour
ﻎﺑﺳﻨ . Il faut lire ﺎﺒﻳﺎﺨ à la place de ﺎﺒﻳﺎﺣ .
[303]
Pour ّﺪﺍﻮﻟﺍ , lisez ﺪﺍﻮﻟﺍ .
[304]
C’est la vieille histoire de Simon et
Simonides. (Voyez le Coq de
Lucien.)
[305]
Littéral. « comme des boucs ».
[306]
Pour ﺪﻣﻌﻠﺍﻭ , lisez ﺓﺪﻣﻌﻠﺍﻭ , avec les manuscrits, l’édition de Boulac et la
traduction turque. Dans cette pièce il y a des vers dont la construction est
très fautive.
[307]
Le mot ﻦﻛ paraît être mis ici pour ﻥﺎﻜ .
[308]
ﻚﻟﻋ est une altération de ﻚﻳﻟﻋ .
[309]
Pour ﻮﺭﺼﺒﺗ , lisez ﻮﺭﺼﺒﻨ . L’hémistiche suivant est tellement altéré que je
n’essaye pas de le traduire. Le vers entier se lit ainsi dans l’édition de
Boulac et dans la traduction turque :
Je dois faire observer que
le traducteur turc a donné le texte de toutes ces pièces, et que, en général,
il ne les a pas expliquées.
[310]
Je lis ﻖﺒﺴﺒ , avec le traducteur turc et l’édition de Boulac. ﺎﻋ ﺎﺳ est pour ﺔﻋ ﺎﺴ .
[311]
Voyez l’introduction de la 1e partie, p. XXVIII.
[312]
Lisez ﻩﺎﻨﻴﺼﻋ .
[313]
Variante : ﻝﻮﻣﻜﻠﺍ .
[314]
Lisez ﻉﺎﺒﺗﻻﺍ .
[315]
ﻡﺪﻌﺒ est une altération de ﻡﻫﺪﻌﺒ .
[316]
Lisez ﺓﺭﻴﻨﻣﻠﺍ .
[317]
Pour ﻰﺑﻨﻟ ﺎﻳ , lisez ﻰﺑﻨﻟ ﺎﺒ .
[318]
Cette pièce est écrite en un dialecte tellement corrompu, que les copistes n’y
ont presque rien compris. Aussi les manuscrits offrent‑ils une foule de
variantes s’écartant les unes des autres au point de rendre impossible le
rétablissement du texte. Il m’a donc fallu renoncer à la tâche de traduire le
reste du poème.
[319]
Littéral. « urbain ».
[320]
Voyez un peu plus loin.
[321]
Les mots dou beït signifient,
en persan, deux vers, couplet ; notre
auteur lui a donné la forme du duel arabe en y ajoutant la syllabe eïn. M. Freytag a parlé de l’espèce de poème appelé Kan‑oua‑kan. (Voyez son Arabische Verskunst, p. 461) Aucun des auteurs que j’ai consultés
n’a fait mention du haufi.
[322]
Ce paragraphe manque dans le manuscrit A, dans l’édition de Boulac et dans la
traduction turque.
[323]
Ce poète se nommait Safi ed‑Dîn Abd el‑Azîz Ibn Seraîa el‑Hilli. Selon Hadji
Khalifa, il mourut en 750 (1349‑1350 de J. C.).
[324]
Littéral. « et de quatre rimes ».
[325]
Beîteïn signifie deux vers ;
mais, chez les Arabes, le vers (beït) doit se composer de deux hémistiches.
Or, dans les mewalîa, les quatre
hémistiches riment ensemble, et, pour cette raison, j’ai rendu beiteïn par quatrain.
[326]
Je lis ﻒﺭﻌﺗ ﺺﺭﺤﻻﺍ ﻢﺍ ﻮﻨﻣ . Le mot ne se
trouve pas dans les manuscrits.
[327]
Il faut lire ﻰﻨﺣﺭﺠ . Le mot ﻰّﻠﺍ est une
altération de ﻯﺬﻠﺍ .
[328]
Le texte donné dans la traduction turque offre la leçon ﻥﻴﻌﺗ ﺎﻣﻠ . Les manuscrits
C et D portent ﻥﻴﺎﻌﺗ à la place de ﻥﻴﺎﻌﻴ
. Je lis ﻥﻴﺎﻌﺗ ﺎﻣﻠ .
[329]
Cette réponse paraît signifier : « J’acquitterai plus tard
l’engagement que j’ai pris avec toi. »
[330]
On connaît les effets du hachîch ou
feuille de chanvre pris en forme de conserve ou fumé comme du tabac.
[331]
Littéral. « aux enfants de l’amour ».
[332]
Il faut lire ﺞﺧ , ﺥﺍ et peut-être ﺥﺪ . L’interjection ﺢﺧﻜ doit être insérée après le mot ﻯﺭﻮﻠﺍ .
[333]
Dans l’ensevelissement des morts, on bouche les orifices naturels avec du
coton. Ici, le mot coton désigne la moustache blanche.
[334]
Je lis ﺖﻗﺒﺴ , avec l’édition de Boulac et la traduction turque.
[335]
Il faut lire ﺢﺼﻮ sans techdîd.
[336]
Peut‑être faut‑il traduire « belles filles d’El‑Hakr ».
[337]
C’est‑à‑dire de l’Histoire universelle. (Voyez la première partie,
Introduction, p. XCVII.)
[338]
Les mots placés entre crochets manquent dans les manuscrits C et D et
dans l’édition de Boulac.
[339]
Le mot ﺔﻨﺴ est de trop ; il ne se trouve pas dans les manuscrits.
[340]
Pour ﻥﺍ , lisez ﻻﺍ , avec tous les manuscrits.
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